III - Vers quelles solutions ?
1) Zoom
n°1
Facteur 2 :
Construction des référentiels de maîtrise et de performance
Activité sportive : le Triple saut
a- Constat qui a
posé un problème et qui a motivé l’innovation
Depuis le texte sur l’évaluation BAC en EPS 1995 les enseignants d’EPS
construisent leurs évaluations certificatives en séparant la performance
(le résultat de l’action) et la maîtrise d’exécution (les
procédures mises en œuvre pour atteindre le résultat).
Au Lycée Cl. Lebois, en Triple Saut, la performance correspond à la
longueur du Triple ; deux barèmes (pour filles et garçons) sont
établis et tiennent compte de la population scolaire.
La maîtrise de l’exécution est centrée sur deux compétences motrices
à acquérir : réaliser un chemin d’impulsion accéléré, et
construire une foulée bondissante (avec un engagé du genou de la jambe
libre vers l’avant) lors du 2ème bond .Ce 2ème
bond « piloté » par le genou (et non par le pied) nous semble
être une acquisition fondamentale dans la construction de l’élève
athlète (organisation motrice présente dans d’autres spécialités
athlétiques) et, il est le témoin d’une représentation mentale du
Triple Saut comme l’enchaînement de 3 bonds et pas seulement d’un 1er
bond en cloche pied...suivi d’un pas d’élan rééquilibrateur...suivi
d’un saut en longueur.
Une partie du référentiel commun aux garçons et filles de la maîtrise
d’exécution différencie donc des conduites typiques : (nous
entendons par conduite typique de l’élève, le comportement
caractéristique de l’acquisition de certains savoirs en action,
analysé à travers un problème fondamental qui est ici : la
construction d’un 2ème bond qui permette d’allonger la
performance du Triple)
le 2ème bond est un pas d’élan rééquilibrateur
|
le 2ème bond est un pas d’élan de géant (le saut est
piloté par un pied rasant qui cherche à aller loin)
|
le 2ème bond est une foulée bondissante (avec un engagé de
genou de la jambe libre vers l’avant)
|
le 2ème bond est une foulée bondissante (avec un engagé de
genou de la jambe libre vers l’avant et le haut)
|
Depuis plusieurs années nous constatons le fait suivant : Les filles n’arrivent
pas à construire un 2ème bond vers l’avant et le haut alors
que régulièrement un certain nombre de garçons y arrivent. C’est
comme si notre barème (commun aux deux genres) empêchait les filles d’atteindre
une note supérieure à 7/10 (dans l’évaluation de la maîtrise d’exécution,
les compétences motrices centrées sur le 2ème bond sont
notées sur10 points ; 10 autres points sont réservés au chemin d’impulsion)
Le problème est l’origine de cette incapacité pour les filles d’intégrer
l’organisation motrice souhaitée.
b- Hypothèse qui
dirige notre étude, qui est une prise de position et qui répond au
problème posé
Nous émettons l’hypothèse que le haut du référentiel de la maîtrise
d’exécution n’est pas adapté aux capacités physiques des filles.
c- Cadre de l’étude,
modalités des recueils des données
Pour éprouver notre hypothèse, nous allons dispenser un apprentissage
systématique et prioritaire de la foulée bondissante (intégrée au
Triple Saut) au cours du cycle pour tous les élèves filles et garçons.
En effet une classe de 1ère ES2 de 33 élèves (18G -15F)
suivra un cycle d’enseignement de 7 heures de Triple Saut.
Une évaluation diagnostique (en début de cycle), puis certificative (en
fin de cycle) seront effectuées par le professeur d’EPS de la classe,
Pierre Pezelier.
L’évaluation certificative sera doublée par une observation vidéo
dans l’objectif d’analyser plus finement la motricité des élèves.
A la suite du cycle d’apprentissage et à partir de l’analyse vidéo
nous répartirons les filles et les garçons dans les différentes
conduites typiques présentées dans le référentiel de la maîtrise d’exécution
d- Analyse des
résultats
évaluation diagnostique : 2/33
élèves possèdent une foulée bondissante (FB) intégrée a leur Triple
saut : Filles 0 % ;
Garçons 6,7 %
évaluation certificative (certifiée par la vidéo) :
Conduites Typiques
|
Filles
|
Garçons
|
le 2ème bond est un pas d’élan
|
7 %
|
11 %
|
le 2ème bond est un pas de géant
|
20 %
|
17 %
|
le 2ème bond est une FB avec engagé de genou vers l’avant
|
66 %
|
45 %
|
le 2ème bond est une FB avec engagé de genou vers l’avant
et le haut
|
6 %
|
27 %
|
Après un apprentissage
systématique de la FB intégrée au Triple Saut, on observe une réelle
évolution de la motricité des élèves. Seul un petit tiers d’élèves
n’a pas acquis au cours de ce 1er cycle cette technique (il
auront un 2nd cycle en Terminale).
On observe aussi « un plafonnement » de la motricité des
filles (seule 1/15 fille organise sa FB vers l’avant et le haut). Ce
plafonnement n’existe pas chez les garçons (27% de ceux-ci réalisent
la conduite la plus élaborée).
Notre hypothèse est confirmée : La réalisation de la FB lors du 2ème
bond vers l’avant et le haut ne dépend pas d’un apprentissage
différencié (puisque les élèves ont reçus les mêmes contenus d’enseignement).
Il provient de la mobilisation de ressources biomécaniques différentes
entre les filles et les garçons. L’engagé du genou vers l’avant et
le haut nécessite une tonicité musculaire et une résistance à la mise
en tension articulo-musculaire lors de la réception au sol qui ne sont
pas compatibles avec les capacités physiques de filles de Lycée qui ne
sont pas des athlètes de club ou d’UNSS.
e- Ce que l’innovation
peut apporter à d’autres collègues dans leur enseignement en EPS.
De cette innovation nous pouvons extraire quelques principes :
. Il faut se méfier des barèmes de maîtrise d’exécution qui, dans l’objectif
recherché d’évaluer les procédures de l’action, évaluent de façon
dissimulée et consubstantielle les capacités physiques (qui ne sont pas
des procédures !). Les barèmes communs sont rarement
« neutres » et sont souvent construits en référence aux
garçons car leurs performances dans les activités énergétiques sont
souvent au delà de celles des filles.
. Dans le respect des références nationales, il faut s’ancrer sur les
caractéristiques de nos élèves et ne pas hésiter à effectuer une
observation in situ avec une ou deux classes pour valider un référentiel
de conduites typiques. Un dysfonctionnement de même type que celui
repéré serait, par exemple en Gymnastique, d’exiger le grand écart
facial pour les garçons et les filles afin de leur mettre 8/10 !
. Il est parfois nécessaire de construire pour les filles un
référentiel différencié (ou une partie du référentiel) dès l’instant
que l’exigence tactique est la même pour tous les élèves. Par
exemple, dans notre étude, il est urgent de construire pour les filles
une partie de référentiel substitutif à l’engagé du genou vers l’avant
et le haut. La prise en compte du pourcentage (%) de la longueur de la FB
rapporté à la longueur totale du Triple Saut, nous permettra de
discriminer les 66% de filles ayant un engagé de genou vers l’avant (et
que celles-ci). La note maximale pourrait être donnée pour une FB
approchant 28% du Triple saut. Cette modalité permettra ainsi de mesurer
l’efficacité technique (gagner de l’espace lors du 2nd
bond proportionnellement aux autres bonds) sans s’appuyer sur les
capacités physiques. Nous restons bien là sur les procédures.
f- Perspectives
. Affiner ce nouveau barème de la maîtrise d’exécution du Triple saut
. Analyser sous le même angle critique le barème de la régularité en
Course de Longue Durée.
2) - Zoom n°2
Facteur 2 : Construction
des référentiels de maîtrise et de performance
Activité sportive : l’Escalade
a- Constat
qui a posé un problème et qui a motivé l’innovation :
On observe un
écart de notation significatif entre garçons et filles en défaveur de
celles-ci au Bac dans les activités sportives dites
« nouvelles » (Escalade Badminton,...). Ce constat a été
statistiquement prouvé par Barbara Delmas dans le cadre de son mémoire
de Maîtrise STAPS à Lyon 2000 « les écarts de notation au
baccalauréat entre les filles et les garçons - étude de cas ».
Cet écart est construit par les enseignants. Cela provient-il d’un
apprentissage différencié ? N’y a-t-il pas, à certains moments
de l’apprentissage de cette activité, des manières différentes d’acquérir
des compétences spécifiques entre garçons et filles et les compétences
évaluées prioritairement par les enseignants ne sont-elle pas celles
développées par les garçons ?
Dans quelle mesure peut on prendre en compte les similitudes ? /
différences ? entre les deux genres ( les évaluations, mais aussi
les situations d’apprentissage, le guidage) sans pour autant s’inscrire
dans une pédagogie des différences ?
b- Hypothèses :
Dans un même type de voie, les garçons et les filles adoptent
majoritairement des conduites motrices de grimpe différentes.
Si cette hypothèse est validée, nous émettons deux autres
hypothèses :
Les logiques organisatrices différentes exigent la construction de voies
différentes pour entrer dans l’activité et construire les premières
compétences spécifiques.
Les différences psychologiques (affectivité, représentations, prises de
risque) entre filles et garçons sont réelles et influent leur manière
de grimper.
c- Cadre de l’étude :
Nous allons
éprouver nos hypothèses en tentant d’analyser les logiques
organisatrices des élèves, leurs motricités et leurs représentations
sociales de l’activité. Les outils d’investigations utilisés seront
. l’analyse
d’un questionnaire permettant de repérer les différences de
représentations des élèves garçons et filles concernant l’activité
escalade.
. l’analyse
vidéo : Les élèves seront filmés sur plusieurs voies de niveaux
différents avec des prises de vues de dos et de trois quarts. Pour chaque
niveau nous ferons l’analyse comparative entre garçons et filles. L’analyse
des images ne sera faite que pour la voie verticale en 5a. Cette
restriction nous permet de comparer les différentes manières de s’organiser
face à la même difficulté. Nous nous sommes centrés sur deux
indicateurs qui nous paraissent refléter au mieux l’organisation
motrice des élèves
. l’orientation
du regard (intervenant dans la prise d’information). Ceci met en
évidence l’importance donnée, par les élèves, à la recherche d’appuis
manuels et/ou pédestres.
. les
appuis utilisés lors des temps d’arrêts. Pour cela nous avons
observé la nature des appuis lors des temps d’arrêts nécessaire pour
la lecture de la voie. (avec 2 pieds - 1 main ou avec 2 mains - 1 pied).
d- Analyse
des résultats :
Dans un même type de voie, les garçons et les filles adoptent
majoritairement des conduites motrices de grimpe différentes
Cette hypothèse se confirme partiellement.
Nous avons caractérisé à l’aide de la vidéo
quatre grandes conduites possibles en Escalade au lycée. Nous pouvons les
qualifier de débutants (A), de débrouillés (B), de confirmés (C) et d’experts
(D). Les filles et les
garçons (en milieu scolaire) adoptent pour les conduites C et D des
façons de faire assez proches qui
ne permettent pas d’établir une différenciation. Cependant il existe
de réelles divergences pour les élèves débutants et débrouillés. En
effet nous avons relevé l’existence de logiques organisatrices que nous
avons appelées « Les pousseurs économiques » et « les
tireurs athlétiques » pour qualifier respectivement d’une part
des conduites plus féminines et d’autre part des conduites plus
masculines. Cette différenciation s’est faite sur les indicateurs
de : « gestion des appuis », « d’équilibration »,
« de coordination d’actions », « de la nature des
prises d’information » et apparaît clairement au sein de
conduites typiques hiérarchisées.
Cette hypothèse étant validée pour les deux
premiers niveaux d’expertise nous allons répondre aux deux autres
hypothèses.
Les logiques organisatrices différentes exigent la construction de voies
différentes pour entrer dans l’activité et construire les premières
compétences spécifiques
Cette hypothèse se confirme.
Il apparaît que les enseignants proposent quasiment les même contenus d’enseignement,
les mêmes voies, les mêmes évaluations quel que soit le genre des
élèves. De plus il s’avère que la construction des voies est très
majoritairement effectuée par des hommes qui ne prennent que très
rarement en considération les caractéristiques spécifiquement
féminines. Or l’existence de logiques d’organisation motrice
nécessite la construction de voies « plutôt féminines » et
« plutôt masculines » pour une entrée plus aisée dans l’activité
escalade. Cependant, s’il est nécessaire de proposer des voies
adaptées à chacun, il est également important de confronter chaque
élève à toutes les situations pour acquérir un répertoire moteur
complet . Nous répondons ainsi à notre problématique qui était de
réduire les écarts de notes sans s’inscrire dans une pédagogie des
différences. Pour cela, nous exigeons, à la fin d’un premier cycle d’enseignement
(15 heures), le passage de chaque l’élève sur les deux types de voies
et non plus sur celles exclusivement masculines.
C’est pourquoi notre hypothèse est partiellement validée. L’entrée
dans l’activité peut être différenciée pour construire les
premières habiletés motrices de grimpe à partir des ressources
spécifiques filles et garçons mais il faut progressivement s’engager
dans une gestuelle la plus polyvalente possible.
Les différences psychologiques (affectivité, représentations, prises de
risque) entre filles et garçons sont réelles et modifient leur manière de grimper.
Cette hypothèse ne peut pas être confirmée ou infirmée.
Nous n’avons pas pu infirmer ou confirmer cette hypothèse car l’analyse
du seul questionnaire n’a pu nous fournir assez d’informations sur ce
sujet. Il faudrait compléter celui-ci avec des analyses de cas en
utilisant les entretiens semi -dirigés comme outils d’investigation.
e- Ce
que l’innovation peut apporter à d’autres collègues dans leur
enseignement en EPS :
La performance est liée à la cotation de la voie réalisée. Une
cotation dépend de l’articulation de plusieurs facteurs : l’inclinaison
du mur, la grosseur des prises, leur
orientation et leur densité.
Il nous semble alors important de proposer des voies adaptées aux
attentes relatives à la logique organisatrice des garçons et des filles
lors d’un premier cycle d’enseignement. Ainsi nous différencierons
deux types de voies :
·
Les voies de type 1 conçues pour les
« tireurs athlétiques », elles se caractérisent par :
. aux niveaux 4 (a, b, c), des voies verticales avec de grosses prises
horizontales.
. aux niveaux 5 (a, b, c), des voies légèrement déversantes,
possibilité de petit surplomb, avec des grosses prises orientées de
moins en moins horizontalement. La densité est importante, les prises peu
éloignées.
. aux niveaux 6 (a, b, c), des voies de plus en plus déversantes avec
surplomb, des prises plus petites orientées de façons complexes
(verticales, inversées…).
·
Les voies de type 2 conçues pour les
« pousseurs(ses) économiques », elles se caractérisent
par :
. aux niveaux 4 (a, b, c), des voies positives avec des prises
horizontales de tailles moyennes. Il s’agira de mettre en place de
grosses prises de pieds qui ne permettent cependant pas de bien se tenir
avec les mains (prises plutôt rondes).. aux niveaux 5 (a, b, c), des
voies verticales, avec des
prises de mains orientées de moins en moins horizontalement. Les prises
de pieds sont de même forme que le niveau 4, leur espacement est accru pour mettre en jeu les facteurs de
souplesse.
. aux niveaux 6 (a, b, c), des voies verticales et déversantes, des
prises plus petites,
orientées de façons complexes (verticales, inversées…) et de plus en
plus espacées.
Chaque
élève, lors de l’évaluation, devra réaliser sa meilleure performance
sur les deux types de voies.
Barème pour
la classe de seconde :
Note sur 20
|
Couple de cotations réalisées (type 1 et 2)
|
Note sur 20
|
Couple de cotations réalisées (type 1 et 2)
|
20
|
6C/6C ou 7A/6B
|
10
|
5A/5A ou 5B/4C
|
19
|
6C/6B
|
9
|
5A/4C
|
18
|
6B/6B ou 6C/6A
|
8
|
4C/4C ou 5A/4B
|
17
|
6B/6A
|
7
|
4C/4B
|
16
|
6A/6A ou 6B/5C
|
6
|
4B/4B ou 4A/4C
|
15
|
6A/5C
|
5
|
4B/4A
|
14
|
5C/5C ou 6A/5B
|
4
|
4B
|
13
|
5C/5B
|
3
|
4A/4A
|
12
|
5B/5B ou 5C/5A
|
2
|
4A
|
11
|
5B/5A
|
1
|
5 mètres grimpés
|
f- Perspectives :
La recherche ne nous a pas permis de confirmer ou d’infirmer
la deuxième hypothèse : Les différences psychologiques
(affectivité, représentations, prises de risque) entre filles et
garçons sont réelles et influent leur manière de grimper. Cette
hypothèse pourrait, en fait, être à elle seule le sujet d’une
recherche qui articulerait, pour le recueil des données, un questionnaire
modifié, des entretiens explicatifs semi-dirigés, une nouvelle analyse
vidéo, une évocation mentale des sujets avec support de la vidéo.
3) Zoom n°3
Facteur 2 : Exigence attendues par
les enseignants
Activité
sportive : Le Volley-Ball
a- Constat
qui a posé un problème et qui a motivé l’innovation
L’analyse statistique des notes d’EPS au BAC montre qu’il existe un
écart de notes significatif entre filles et garçons. Même si notre
établissement présente un écart de notation faible, il subsiste en
Volley-Ball une différence significative : L’analyse des notes de
l’établissement réalisée en 1997 dans le cadre de la recherche INRP
sur les pratiques enseignantes concernant l’évaluation au BAC EPS fait
apparaître un écart de plus de 2 points dans cette activité : Moy.
G = 13,20 (155 notes) - Moy.
F = 11,22 (153 notes). Cet écart est construit par l’enseignant quand
il met en rapport l’analyse de la motricité des élèves et un
référentiel commun .
Au lycée Claude Lebois, en Volley Ball, la performance est évaluée en
référence à 4 niveaux de jeu collectif, les équipes étant homogènes
en leur sein.
La maîtrise de l’exécution est évaluée sur deux critères : La
capacité de l’élève à attaquer la cible adverse (l’attaque) et la
capacité à conserver la balle dans son propre terrain pour mettre en jeu
un partenaire (coopération). Elle est appréciée en 4 niveaux identiques
pour les garçons et les filles.
|
Niveau 1
|
Niveau 2
|
Niveau 3
|
Niveau 4
|
Attaque
|
Ratée
|
cadeau
|
Met en difficulté
|
Marque le point
|
Coopération
|
Ratée
|
Met en difficulté le relayeur
(sauvetage)
|
Oblige le relayeur à se déplacer
Ne donne pas tous les choix au
relayeur
|
Joue sur le relayeur
Permet tous les choix au relayeur
|
La mixité, semble désavantager les filles dans la mesure où en Volley
Ball elles sont souvent cantonnées dans un rôle de faire valoir
(passeur) de leur partenaire masculin (attaquant). De ce fait, on constate
que les filles attaquent peu souvent l’adversaire et très rarement en
smash.
Le problème est donc de prendre en compte ce constat dans le traitement
didactique de cette activité dès l’instant que l’on ne se satisfait
pas du rôle exclusif de coopération chez les filles
b- Hypothèse qui
dirige notre étude, qui est une prise de position et qui répond au
problème posé
Nous émettons l’hypothèse qu’en développant chez les filles la
frappe smashée, nous leur permettons d’intégrer les deux derniers
niveaux d’attaque du référentiel de la maîtrise d’exécution. Ce
choix nécessite une modification des variables didactiques pour que les
filles jouent toujours avec les garçons
c- Cadre de l’étude,
modalités du recueil des données.
Pour éprouver
notre hypothèse, nous observerons deux temps dans notre démarche :
1er temps :Analyse
vidéo et questionnement des élèves
Observation de phases de jeu en 4 contre 4, équipes mixtes, pour mettre en
évidence :
. L’influence de la hauteur du filet et de la
taille des joueurs sur le nombre de frappes smashées (3 hauteurs de filet
utilisées : 2m10-2m24-2m43)
.
L’influence du placement des joueurs sur le terrain adverse en fonction
de leur sexe, de leur taille, de leur niveau de jeu .
Cette observation a été réalisée sur des joueurs se situant à la
recherche de la rupture de l’échange.
Questionnement oral à l’issue de chaque
séquence de jeu dans l’intention de connaître leurs représentations
de l’activité, leurs conceptions de la rupture de l’échange.
2ème temps : Apprentissage systématique et prioritaire du smash au cours d’un
cycle de volley-ball pour deux classes de terminales : TBEP de 18
élèves (15F-3G) et TL2 de 26 élèves (23F-3G)
Une évaluation diagnostique (en début de cycle), et certificative (en
fin de cycle) seront effectuées.
L’évaluation
certificative sera doublée par une observation vidéo pour analyser plus
finement les conditions d’apparition de la frappe smashée.
d- Analyse des
résultats.
Bilan des évaluations diagnostique et certificative
Conduites
typiques dans la recherche de la rupture de l’échange
|
Évaluation diagnostique
|
Évaluation certificative
|
|
F
|
G
|
F
|
G
|
N’attaque
pas l’adversaire
|
76%
|
17%
|
28%
|
17%
|
Renvoi
placé : balle rapide, espaces adverses visés
|
24%
|
0%
|
26%
|
0%
|
Frappe
accélérée à 1 main de type smash sans impulsion
|
0%
|
0%
|
36%
|
0%
|
Frappe
smashée dans des situations pas toujours favorables
|
0%
|
83%
|
10%
|
66%
|
Frappe
smashée et maîtrisée
|
0%
|
0%
|
0%
|
17%
|
Après un apprentissage systématique du smash, on observe une nette
évolution dans l’intention de jeu : créer la rupture de l’échange
pour mettre l’adversaire en difficulté. De plus on observe que les
filles ont progressé plus vite que les garçons car elles ont été très
motivées par l’apprentissage d’un geste qu’elles jugeaient alors
réservé aux seuls garçons.
·
Influence de la hauteur du filet et de
la taille des joueurs(euses) :
S’il est vrai qu’une hauteur de filet de 2 mètres encourage la frappe
smashée chez les filles, il n’en demeure pas moins vrai que cette
hauteur de filet facilite les trajectoires plus tendues lors des renvois
adverses et rend la construction de jeu plus aléatoire. L’adoption d’une
hauteur de 2m10 pour les joueurs de petite taille et 2m24 pour les plus
grands, favorise des trajectoires plus en cloche et permet la construction
d’attaques smashées. Les filles ont adopté une frappe de type
smashée, pieds au sol, frappe qui met l’adversaire en difficulté car
induisant une trajectoire plus tendue et plus longue arrivant dans la zone
arrière du terrain adverse. De plus ce type de frappe permet de pallier
un manque de puissance fréquent chez la plupart des filles.
·
Influence du placement des joueurs sur
le terrain :
en utilisant un protocole de jeu dit « en miroir » (rotation
inverse des équipes au service). L’utilisation d’une frappe
« smashée » devient possible pour les filles tout en
continuant à jouer avec les garçons,.
Notre hypothèse est partiellement confirmée. La frappe smashée pieds au
sol est un élément organisateur pour l’attaque de camp adverse. En
effet, elle permet aux filles de véritablement s’inscrire dans une
rupture intentionnelle du jeu. L’enseignement de cette technique
nécessite une adaptation des variables didactiques. L’attaque smashée
avec impulsion requiert, elle, des ressources physiques ( vitesse,
détente, coordination) et mentales (prise de risque, agressivité) que l’on
trouve plus fréquemment chez des joueuses plus
expérimentées pratiquant à l’UNSS ou en club. Elle n’est pas
à construire en premier chez les filles de niveau scolaire.
e- Ce que l’innovation
peut apporter à d’autre collègues dans leur enseignement en EPS.
Cette étude peut aider à porter un regard nouveau sur la motricité des
filles et doit engager l’enseignant vers une pédagogie différenciée
plutôt que vers une pédagogie des différences.
Dans notre cas d’étude, pour la compétence « chercher la rupture
de l’échange pour mettre l’adversaire en difficulté » on peut
très bien admettre deux mises en œuvre : une attaque placée avec touche haute
à 2 mains et une frappe smashée avec impulsion
pour les garçons ou
frappe smashée pieds au sol
pour les filles ; Ces deux mises en œuvre ont la même intention tactique,
donc la même valeur. C’est en cela que l’on est garant d’un même
niveau d’exigence pour tous les élèves filles ou garçons.
De plus, arriver à attaquer « comme les
garçons » mobilise beaucoup les filles car c’est aussi une
conquête pour construire une image positive de soi et développer ainsi
un sentiment de compétence. C’est pourquoi l’apprentissage de cette
frappe smashée pied au sol est un enjeu qui va au delà d’une simple
acquisition technique.
f- Perspectives
Repérer d’autres expressions de la motricité développées
majoritairement par les filles.
Poursuivre
la recherche dans un groupe plus équilibré dans la répartition
filles/garçons.
|