Les filles et les garçons, c’est différent ?

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Programme National d'Innovation 99-01. (PNI 3)
Monographie produite en juin 2001

 

Les filles et les garçons, c’est différent ?
(Construction d’outils didactiques en EPS visant à réduire l’écart de notation entre filles et garçons)

 

L’analyse statistique des notes d’EPS au baccalauréat montre qu’il existe un écart de note significatif entre filles et garçons. Sur ce sujet le Lycée Claude Lebois présente le plus petit écart garçons/filles de l’Académie de Lyon (0, 52 point contre 1,3 point en 1997). L’équipe EPS du Lycée Lebois se propose : d’identifier les facteurs qui concourent à la construction de cet écart à partir de faits de connaissances dans et hors le champ de l’EPS, d’interroger l’organisation de son enseignement et de construire des outils didactiques de remédiation (choix de programmation d’activités physiques et sportives, choix des contenus d’enseignement, choix de compétences à évaluer). L’objectif est de réduire cet écart de notation entre garçons et filles sans s’inscrire dans une pédagogie des différences. L’analyse d’un questionnaire sur ce sujet, posé aux collègues des autres disciplines, montre une réelle méconnaissance de la division sexuée des savoirs au sein de la communauté éducative.

Mots clés :

évaluation, didactique, mixité, genre, EPS

Académie de LYON
Lycée polyvalent Claude Lebois

8 Boulevard Alamagny  BP 128

42408 St-Chamond cedex
N° tel : 0477220637

N° fax : 0477227185
 sylvie.berge@libertysurf.fr
Axe du projet :Aide individualisée et cohérence éducative – pole 2a / 01-13

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Remonter à l'en-tête.  Sommaire :

I - Pourquoi une innovation en EPS sur ce thème ?
II - Quels facteurs favorisent les écarts de notation entre garçons et filles ? 
III - Vers quelles solutions ?
IV - Quelles sont les réflexions et pratiques dans les autres disciplines ?
V - Annexes
VI - Bibliographie  
 

 

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I - Pourquoi une innovation en EPS sur ce thème ?

1) Pourquoi une innovation centrée sur l’équité de notation entre garçons et filles en EPS au Baccalauréat?

 remonter au sommaire a- Parce que c’est un problème posé à l’ensemble de notre système éducatif dès l’introduction des filles dans le système scolaire mixte obligatoire, que Clément (1998) date à partir de la réforme Berthoin de 1959. Cette réforme a déclenché le processus d’homogénéisation du secondaire et a posé en conséquence, le problème de l’harmonisation des contenus d’enseignement.

De nos jours, ce problème est suffisamment prégnant pour que le législateur intervienne à plusieurs reprises dans les textes officiels :

. Convention pour la promotion de l’égalité des chances entre filles et garçons, les femmes et les garçons dans le système éducatif  2000/2003 (BOEN N° 10 du 9 Mars 2000)

Ce texte constate un accès inégalitaire des hommes et des femmes au marché du travail et invite le système éducatif à définir une politique globale d’égalité des chances entre les sexes en direction de tous les acteurs (valoriser l’orientation scolaire et professionnelle des filles et garçons, promouvoir une éducation fondée sur le respect mutuel des deux sexes, renforcer les outils de promotion de l’égalité et la formation des acteurs)

. A l’école au collège et au Lycée : de la mixité à l’égalité (BO spécial N°10 du 2 Nov 2000)

Ce texte de 36 pages présente des scénarios de la vie éducative, analyse les stéréotypes, les conséquences, les recommandations à travers plusieurs temps forts de l’action scolaire : les interactions en classe, le travail de groupe, les activités physiques, l’évaluation, l’éducation à l’orientation, l’éducation à la santé, à la sexualité et la prévention des violences sexistes et sexuelles

. Filles et Garçons à l’école : une égalité à construire : (sous la direction de Françoise Vouillot) 2000 CNDP coll. « Autrement dit »

Cet ouvrage collectif de 156 pages, préfacé par le ministre de L’Education Nationale, apporte des éléments de connaissances sur l’histoire de la mixité, sur la nature des interactions prof- garçons/filles, sur l’orientation différenciée. L’ouvrage fait le point sur les recherches entreprises en histoire, en sociologie, en psychologie et en sciences de l’éducation sur la division sociosexuée des savoirs et sur la difficulté de construire une réelle égalité.

 remonter au sommaire b- Parce que c’est un problème posé à notre discipline d’enseignement : l’Education Physique et Sportive. En effet, cette discipline obligatoire se singularise par un écart de notes significatif entre garçons et filles dans les examens de fin de cursus BAC, BEP, CAP. Cet écart avait déjà été remarqué lors des premières analyses statistiques après la réforme du BAC EPS de 1983. Il est présent dans toutes les académies, il s’amplifie avec le temps : Volondat et Davisse (1987) relevait pour plus de 250000 candidats et candidates au BAC un écart moyen de 0,81 point ( 12,47 pour les filles, 13,28 pour les garçons, moyenne totale de 12,84).

Une recherche INRP 1996/1999 centrée sur la certification au Bac sous la direction de  David (2000) actualise ces données. En tant que chercheur associé et responsable de l’analyse statistique de cette recherche Cleuziou J.P. (2000) annonce, pour un échantillon de 52000 candidats, un écart moyen de 1,1 point entre garçons et filles (1,35 pt pour les compétences et 0,35 pt pour les connaissances).

Les résultats de l’académie de Lyon montrent que pour le bac général et technologique il existe un écart de 1,30 point en 1997, un écart de 1,31 point en 1998, un écart de 1,13 en 1999. Cet indicateur de la moyenne a été retenu car il est le plus « parlant » pour les enseignants et les élèves.

 remonter au sommaire c- Parce que notre établissement scolaire témoigne aussi de ce fait bien que nous nous singularisons par le plus petit écart de notation entre garçons et filles du département de La Loire et cela depuis des années.

Ecart moyen garçons - filles en 1997. Bac général et techno : Loire (1,25) / Lycée Lebois (0,52)

Ecart moyen garçons - filles en 1998. Bac général : Loire (1,19) / Lycée Lebois (0,7)

Bac techno : Loire (1,00) / Lycée Lebois (0,32)

Ecart moyen garçons - filles en 1999. Bac général : Loire (1, 15) / Lycée Lebois (0,87)

Bac techno : Loire (1,22) / Lycée Lebois (0,30)

 remonter au sommaire d- Parce que chaque enseignant est impliqué car il se doit de permettre à tous les élèves d’accéder à leur plus haut niveau de maîtrise et d’évaluer leurs connaissances (savoir et savoir faire) en tenant compte le mieux possible des caractéristiques physiques, psychologiques, sociologiques des élèves et des exigences des programmes.

Très souvent, l’enseignant d’EPS ne se sent pas concerné car il justifie cet écart de notation : « Les filles sont moins  sportives , elles pratiquent moins le sport en club. » , « Les filles sont moins motivées que les garçons par la pratique sportive. »

en s’appuyant sur des faits vérifiés par des enquêtes nationales :

Enquête Inserm 1993 relevée par Davisse (2000): les garçons pratiquent un sport en dehors de l’école à 73% contre 48% pour les filles et cela de manière plus intensive.

Enquête Insep 1987 relevée par Davisse (2000) : de 12 à 17 ans 53,7% des garçons sont licenciés sportifs pour 28,7% des filles du même âge.

  

2)  Alors... pourquoi les moyennes des filles devraient être sensiblement les mêmes que celles des garçons ?

L’Observatoire académique des examens en EPS de l’Académie de Lyon sous la direction de Labiche et Nesme (1998), avancent certains arguments que nous reprenons ici :

« Sur un plan génétique nous sommes tous près à distinguer deux populations différentes entre les garçons et les filles. Il ne viendrait à l’esprit d’aucun enseignant d’EPS de noter la performance de 9 m en triple saut avec un barème identique pour les filles et les garçons. C’est pourquoi on associe aux activités sportives métrées et chronométrées des barèmes différents quant à la performance (considérée très souvent dans la profession comme étant le résultat de l’action).

Sur le plan culturel on reconnaît des différences de comportements vis à vis de la pratique sportive des filles et des garçons. On doit aussi prendre en compte cet état initial composé de deux populations différentes avec des motivations parfois fort éloignées pour la pratique de certaines activités physiques sportives et artistiques (APSA).

Et prendre en compte ces différences culturelles et génétiques ce n’est pas les figer, c’est les faire évoluer tout en préservant une exigence identique concernant les compétences stratégiques et tactiques. Les mises en œuvre de ces compétences peuvent être différentes chez une majorité de filles et une majorité de garçons : Créer la rupture en Badminton, en jouant prioritairement placé ou en jouant prioritairement fort, ce sont deux mises en œuvre différentes d’une même compétence motrice (rompre intentionnellement à son profit). Et l’une n’est pas à être valorisée plus que l’autre... Les deux sont à construire. »

Égalité ou équité ?

L’égalité c’est la même chose, la même loi pour tous et chacun. En ce qui concerne notre sujet, c’est donc la mise en place des mêmes contenus, de la même démarche didactique, d’évaluations identiques.

Or les travaux de la sociologie des inégalités sociales (Bourdieu et Passeron, Baudelot et Establet) ont bien montré qu’on ne corrigeait pas les inégalités sociales lorsqu’on se contentait de traiter également des élèves au départ socialement inégaux.

Il en est de même pour l’enseignement de l’éducation physique et sportive qui s’adresse à des filles et des garçons n’ayant pas le même vécu sportif. L’observatoire Académique des Examens rappelle que de « ne pas tenir compte des différences génétiques et culturelles des populations filles et garçons, au nom d’une égalité proclamée, c’est en réalité reproduire et entretenir une inégalité de fait du rapport au corps. Or sur un plan culturel, pour combattre les représentations discriminatoires (« le sport, c’est pour les garçons »), il faut nécessairement partir de l’état initial des valeurs culturelles et ne surtout pas les ignorer. »

C’est pourquoi nous revendiquons le concept d’équité plutôt que celui d’égalité.

Selon Encyclopédie Universalis (1990), l’équité est une conception de la justice qui sert à compléter, à corriger, à humaniser les règles du droit positif quand celles-ci sont trop générales, trop impersonnelles ou inadaptées à l’évolution des connaissances de la société.

Les pratiques équitables d’aujourd’hui sont souvent les règles juridiques de demain. Pour Aristote l’équité « c’est la justice tempérée par l’amour », en rupture avec une justice implacable et déshumanisée. Le lien avec l’égalité est précisée dans le Petit Robert (1996) qui indique que « l’équité c’est mettre chacun sur un pied d’égalité »....avant de l’évaluer (rajouté par nous !).

Dans notre problématique, être équitable avec les Filles et les Garçons, c’est prendre en compte les différences génétiques et l’expression différenciée de la motricité dans les barèmes de performance et les référentiels de la maîtrise d’exécution.

Mais la recherche d’équité ne doit pas organiser de fait une pédagogie des différences par un enseignement à deux vitesses. Elle doit apporter à chaque élève fille ou garçon, les compétences lui permettant de construire sa future vie physique d’adulte. C’est pourquoi nous poursuivons, dans le cadre d’une coéducation une véritable égalisation des savoirs mais des savoirs qui peuvent s’exprimer de façons différentes, des savoirs qui ne soient pas exclusivement associés à des modèles sociaux masculins.

Cette analyse peut être résumée par Davisse (2000), Pour qui « l’ambition d’une culture commune suppose la prise en compte de l’activité réelle des sujets dans la diversité de leurs mobiles » (soulignés par nous).

A plusieurs titres, l’enseignant d’EPS, qui désire rester concepteur de son enseignement est donc bien impliqué vis à vis de ce concept d’équité dans l’enseignement et l’évaluation des Filles et des Garçons

  

3)  Présentation de notre production

A ce jour, quelles réflexions sur ce sujet ?

A ce jour, les références écrites diffusées sur ce sujet ont toutes été centrées sur l’explicitation de ce fait (David 2000), Delmas 2000), sur  les facteurs concourant à la construction de cet écart de notation  (Bergé 2000 a, Observatoire Académique des examens de Lyon 1998), sur les motricités différenciées des filles et des garçons engagés dans une activité sportive (Ancel 1999, Pézelier 2000) mais aucunement sur les remédiations didactiques à mettre en œuvre pour assurer l’équité de notation entre filles et garçons. Seul le dernier BO spécial N° 10 du 2 Nov 2000 présente quelques recommandations didactiques en Hand-Ball et Danse.

Nous allons dans cette monographie avancer plusieurs propositions didactiques.

Cependant, il n’est nullement le lieu, ici, d’analyser les facteurs psycho-sociologiques qui, dès la petite enfance, (la naissance ?, la conception ?), ont contribué à la différence des représentations des pratiques sportives entre filles et Garçons. Nous renvoyons le lecteur à deux auteurs complémentaires sur ce sujet : Mosconi (2000) et Davisse (2000).

Le choix du thème de notre innovation est motivé par plusieurs intérêts :

. Chercher à comprendre les processus qui font que les enseignants d’EPS construisent un écart de notation entre Filles et Garçons

. Chercher à comprendre pourquoi notre établissement présente le plus petit écart de notation entre Filles et Garçons

. Prendre position contre la construction de cet écart et défendre une équité de notation

. Aider les autres établissements à modifier leurs pratiques, leurs contenus, leurs représentations sur ce sujet

. Enfin, répondre au sentiment de justice que peuvent vivre les élèves et notamment les filles

Nous ancrons notre innovation sur les quelques travaux existants :

Dans le cadre d’une recherche INRP 1996/1999, Bergé (2000 a) avait avancé 5 questions pour identifier les possibles de la construction de cet écart.

L’observatoire académique des examens en EPS de Lyon (1998) avait repris ces 5 questions et identifié autant de facteurs concourant à la construction de cet écart.

Notre innovation est composée de 3 sous ensembles :

Dans un 1er temps, en nous ancrant sur ce travail déjà réalisé, nous allons définir 5 hypothèses explicatives associées aux facteurs identifiés au préalable. En annexes, ces hypothèses seront éclairées par des référents scientifiques hors et dans le champ de l’EPS. Nous montrerons comment notre établissement prend en compte chacun des facteurs concourant à la pratique de cet écart.

Dans un 2ème  temps, nous présenterons 3 remédiations didactiques centrées sur 2 des 5 facteurs identifiés. Pour plus de lisibilité, nous présenterons ces innovations selon le protocole de la démarche expérimentale.

Dans un 3ème  temps, nous analyserons un questionnaire qui a été posé à l’ensemble des collègues des autres disciplines d’enseignement. L’intérêt est de vérifier si la division sexuelle des savoirs et le rôle que les enseignants prennent dans ce processus sont perçus par l’ensemble de la communauté enseignante .

 

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II- Quels facteurs favorisent les écarts de notation entre garçons et filles ?

   1)  Hypothèse 1 : Une programmation privilégiant les APSA historiquement masculines participe à la construction de cet écart

Facteur 1 : Nature de la programmation

Les référents scientifiques hors et dans le champ de l’EPS sont portés en Annexe.

Il faut inventer un équilibre pour construire une culture commune partagée alliant activités historiquement féminines et activités historiquement masculines pour que chaque imaginaire y repère un investissement possible.

Dans notre établissement, nous choisissons pour chaque classe administrative de Terminale l’un des deux menus suivants : Athlétisme (course de longue durée et Triple saut) - Volley -  Gymnastique (pour 80% des élèves) ou Athlétisme (course de longue durée et Triple saut)   Hand - Badminton (pour 20% des élèves).

En Volley, en 1997, 155 Filles ont obtenu 11,22 de moyenne (pour 153 Garçons qui ont obtenu 13,3 de moyenne) ce qui fait une différence de 2,02 points en faveur des Garçons.

En revanche, en Gymnastique, les Filles ont 13,42 de moyenne (pour une moyenne de Garçons de 11,42) ce qui fait une différence de 2 points, cette fois ci en faveur des Filles.

De plus, l’analyse des moyennes confondues filles et garçons dans chacune des APSA montre une grande stabilité de celles-ci : autour de 12,3. On peut ajouter qu’il existe peu de corrélation entre les notes des élèves dans les 3 APSA d’un même menu (qui, nous le rappelons, est imposé aux élèves), ce qui témoigne de l’exigence d’une véritable polyvalence.

Une programmation prenant en compte le singulier féminin permet d’associer les représentations sociales des APSA des Filles et des Garçons, développer des motivations et des compétences différentes, et donc de rapprocher leurs notations au bac EPS.

  

2) Hypothèse 2: Des référentiels d’évaluations ne prenant pas en compte les différences génétiques et les capacités motrices différenciées des filles et des garçons participent à la construction de cet écart

Facteur 2 : Construction des référentiels de maîtrise et de performance

Les référents scientifiques hors et dans le champ de l’EPS sont portés en Annexe.

Si les différences génétiques sont prises en compte dans les activités chronométrées et métrées, aucun référentiel ne prend en compte la puissance, la force, la vitesse de déplacement moindre chez les filles que chez les garçons. Si un enseignant attend qu’un smash en volley réalisé par une fille soit aussi puissant que celui d’un garçon pour mettre le note maximale, il ne la mettra pas! Il en est de même pour le replacement défensif, pour l’interception. Quand les options stratégico-tactiques sont  de même nature pour les deux sexes, l’expression motrice de celles-ci ne peut ne pas être identique ; alors qu’il semble que lors de l’évaluation, il y ait une attente identique concernant les capacités motrices des élèves dans les activités qui ne sont pas mesurées ou métrées.

Le niveau d’exigence concernant la stratégie et la tactique doit être préservé pour tous les élèves, c’est la mise en œuvre de ces schémas qui doit être repensée. La balle placée au sol lors d’une attaque en Volley doit avoir la même valeur de notation qu’une balle smashée.

Dans notre établissement, nous essayons d’être particulièrement vigilants sur ce sujet. Au cours de l’évaluation en Badminton, lors d’un rapport de force équilibré entre une fille et un garçon et pour un modèle de jeu en rupture, la fille aura une note supérieure au garçon en performance bien qu’elle fasse jeu égal, car génétiquement, la fille est statistiquement moins rapide et moins explosive que le garçon . C’est autour de ce facteur que nous concentrons actuellement nos réflexions. C’est pourquoi 2 remédiations didactiques seront développées  en 2nde partie

Il nous appartient donc, de construire des échelles de notation qui partent réellement des possibilités motrices des élèves et, dans le cadre des programme en vigueur, d’en arrêter les exigences statégico-tactiques minimales (celles qui valent la note de 10/20) pour tous les élèves.

  

  3) - Hypothèse 3 : Les habitus traditionnels de répartitions des taches et des compétences entre filles et garçons véhiculées par les enseignants participent à la construction de cet écart

Facteur 3 : Exigences attendues par les enseignants

Les référents scientifiques hors et dans le champ de l’EPS sont portés en Annexe.

La sociologie des inégalités sexuelles (notamment les recherches anglo-saxonnes des années 80)  montre que les personnels du système éducatif contribuent largement à créer des différences et des inégalités entre Filles et Garçons au cours de leur scolarisation.

L’Education Physique et Sportive comme discipline d’enseignement obligatoire n’échappe pas à ce processus de transmission de ces habitus. Nous aussi, nous ne sommes pas à l’abri des représentations sociales communément véhiculées par la société sur la répartition des tâches entre les sexes.

Toutes les variables didactiques sont-elles toujours utilisées pour que les filles ne soient pas cantonnées à certains rôles spécifiques comme elle le sont quelquefois dans la vie quotidienne ? (la hauteur des filets de Volley permet-elle le smash de celles-ci quand les équipes sont mixtes ? Ne les réduit-on pas au rôle de passeuse ? Les référentiels de gymnastique engagent-ils la réalisation du saut de mains chez les filles ?)

Est-ce que les enseignants ont la même ambition concernant le développement moteur pour les filles et les garçons ?

Est-ce que l’observation objective de moindres capacités physiques chez les filles n’induit pas inconsciemment une exigence moindre en terme de compétences motrices attendues ?

Dans notre établissement, chaque enseignant est en « conflit de valeur » permanent (Durand 1999) entre d’une part, ses valeurs mais aussi ses préjugés, ses représentations intimes  souvent implicites de la division sexuelle des tâches et d’autre part, l’objectif d’émancipation qu’il a mission de poursuivre avec tous ses élèves.

Dans le choix de nos contenus d’enseignement, dans notre guidage des élèves, il faut faire acte de vigilance pour permettre aux filles d’acquérir des savoirs moteurs de même nature que ceux espérés chez les garçons.

Ce facteur sera étudié en 2nde partie. Une remédiation didactique sera développé sur ce thème.

  

  4) Hypothèse 4  : La permission accordée aux élèves de choisir leurs APSA au sein de leur unités d’enseignement (menus) participe à la construction de cet écart

Facteur 4 : Choix par l’enseignant ou les élèves des APSA du menu

Les référents scientifiques hors et dans le champ de l’EPS sont portés en Annexe.

Une analyse de l’observatoire académique sur les examens (1998) portant sur 5 établissements de la Loire (qui gardent en EPS la classe administrative avec un menu imposé pour tous) a montré des écarts plus réduits entre les notes les plus hautes (majoritairement celles des garçons) et les notes les plus basses.

Notre établissement est l’un de ceux-ci et il présente le plus petit écart de notation au Bac général entre Filles et Garçons de la Loire :  0,52  en 1997 ;  0,69  en 1998 ;  0,53 en 1999

Nous pensons avoir bien maîtrisé ce facteur du choix de la programmation. Permettre aux élèves de choisir leurs APSA pour composer leur menu c’est favoriser les meilleurs d’entre eux au détriment des plus faibles (souvent les filles) qui eux subissent des non choix avec ainsi en résultante, un agrandissement des écarts. C’est aussi moins s’engager vers une polyculture des APSA.

De plus, garder sa classe administrative en Terminale permet d’autres avantages : échanger en conseils de classe sur tous les élèves avec les collègues des autres disciplines, s’impliquer dans un projet de classe interdisciplinaire, être professeur principal de classe de Terminale (Depuis 1995, 3 enseignants d’EPS l’ont été).

 

  5)  Hypothèse 5  : L’enseignante plus que l’enseignant, quand elle évalue, participe à la construction de cet écart

Facteur 5: genre de l’enseignant évaluateur (homme ou femme)

Une analyse statistique précise réalisée par Bergé (2000 a) montre qu’une collègue femme, plus qu’un collègue homme a statistiquement plus de chance d’accroître l’écart de notation entre les filles et les garçons au profit de ces derniers. Une hypothèse explicative est présentée en Annexe pour  expliquer ce phénomène.

Dans notre établissement, jusqu’en 1997 l’équipe pédagogique était composée de 5,5 poste homme pour ½ poste femme ; A la rentrée 1997/1998, une collègue femme à plein temps remplaçait le ½ poste. L’analyse de ses notes pour les classes de Terminale montre qu’elle présente un écart filles-Garçons au profit de ces derniers de 0,64 pt en 1999 (pour 30 G,70 F) ; de 0,73 en 2000 ( pour 33 G, 30 F) donc bien en deça de la moyenne des écarts de notation repéré en 1997 des collègues femmes (1,54) mais aussi des collègues hommes (0,97) du département de la Loire en 1997.

Cet écart est réduit grâce à la connaissance de ces faits cachés, grâce au souci  de traiter équitablement Filles et Garçons dans la notation en se distanciant de ses propres représentations de la réussite sportive.

C’est donc par un effort de vigilance permanent que ce facteur peut disparaître, que l’on soit enseignant ou enseignante en EPS. Il n’y a pas de culpabilisation à avoir, c’est en se connaissant mieux que l’on peut mieux reconnaître les autres.

  

6)  Conclusion

L’étude de la singularité de notre établissement et de notre notation  montre que ce sont sur deux des cinq facteurs que l’équipe doit concentrer sa réflexion : la construction des référentiels de notation et les exigences attendues par des enseignants. C’est  pourquoi nous avons mis en œuvre 3 innovations que nous présenterons pour plus de lisibilité sous la forme de la démarche expérimentale

Zoom n°1

Facteur  2 : Construction des référentiels de maîtrise et de performance

Activité sportive : le Triple saut

Zoom n°2

Facteur  2 : Construction des référentiels de maîtrise et de performance

Activité sportive : l’Escalade

Zoom n°3

Facteur  3 : Exigences attendues par les enseignants

Activité sportive : Le             Volley Ball

Il appartient à chaque équipe EPS de se référer aux 5 facteurs concourant à la différence de notation et à identifier parmi ceux-ci lesquels peuvent influencer la construction de l’écart  de notation Filles-Garçons dans leur établissement. Il est cependant essentiel que les enseignants soient persuadés de la nécessité de réduire cet écart en recherchant les causes sous-jacentes. Baisser la moyenne des garçons arbitrairement parce que les textes exigent une égalité de notation est une modalité que nous refusons en tant qu’enseignants concepteurs de notre enseignement.  

De même, revenir à une séparation des élèves filles et garçons au sein de classes différenciées sous prétexte qu’il est plus facile de noter que des élèves du même sexe dans une même classe serait dangereux car on perdrait alors l’objectif de coéducation.

Pour Davisse (2000), même si les travaux scientifiques sur les différences rendent compte avec évidence des difficultés de la mixité (comme une hétérogénéité à gérer), ils plaident contre le retour en arrière, « le réenfermement » car ils évitent de conforter les représentations stéréotypées des rôles sociaux : « l’école en proposant d’autres activités, d’autres représentations, d’autres savoirs doit aider l’enfant à s’émanciper des modèles de son entourage.»

Notre discipline n’est pas la seule à ne pas préserver une équité d’enseignement entre Filles et Garçons. Mosconi (2000) rappelle qu’il existe des écarts de pratique dans les activités langagières scolaires  entre Filles et Garçons au profit de ces dernières Il appartient à chaque discipline d’expliciter les facteurs concourant à cet écart et à construire des outils didactiques pour les réduire.

Enfin, le problème de l’inaptitude totale reste posé à notre discipline d’enseignement car elle exclue de fait en 2000 dans le département de la Loire (Académie de Lyon ) 10,5 % des filles du Bac général  EPS (pour 3,36 % de garçons ) et  14,06  % de filles du Bac technologique EPS (contre 3,54 % de garçons). Ce sont des élèves (et à majorité des filles) qui se soustraient parfois volontairement d’une culture sportive partagée.  

Nous présentons maintenant, en 3éme  partie, nos propositions de remédiations didactiques

 

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III - Vers quelles solutions ?

    1)  Zoom n°1

 Facteur  2 : Construction des référentiels de maîtrise et de performance

Activité sportive : le Triple saut

 remonter au sommaire a- Constat qui a posé un problème et qui a motivé l’innovation

Depuis le texte sur l’évaluation BAC en EPS 1995 les enseignants d’EPS construisent leurs évaluations certificatives en séparant la performance (le résultat de l’action) et la maîtrise d’exécution (les procédures mises en œuvre pour atteindre le résultat).

Au Lycée Cl. Lebois, en Triple Saut, la performance correspond à la longueur du Triple ; deux barèmes (pour filles et garçons) sont établis et tiennent compte de la population scolaire.

La maîtrise de l’exécution est centrée sur deux compétences motrices à acquérir : réaliser un chemin d’impulsion accéléré, et construire une foulée bondissante (avec un engagé du genou de la jambe libre vers l’avant) lors du 2ème bond .Ce 2ème bond « piloté » par le genou (et non par le pied) nous semble être une acquisition fondamentale dans la construction de l’élève athlète (organisation motrice présente dans d’autres spécialités athlétiques) et, il est le témoin d’une représentation mentale du Triple Saut comme l’enchaînement de 3 bonds et pas seulement d’un 1er bond en cloche pied...suivi d’un pas d’élan rééquilibrateur...suivi d’un saut en longueur.

Une partie du référentiel commun aux garçons et filles de la maîtrise d’exécution différencie donc des conduites typiques : (nous entendons par conduite typique de l’élève, le comportement caractéristique de l’acquisition de certains savoirs en action, analysé à travers un problème fondamental qui est ici : la construction d’un 2ème bond qui permette d’allonger la performance du Triple)

 

le 2ème bond est un pas d’élan rééquilibrateur

le 2ème bond est un pas d’élan de géant (le saut est piloté par un pied rasant qui cherche à aller loin)

le 2ème bond est une foulée bondissante (avec un engagé de genou de la jambe libre vers l’avant)

le 2ème bond est une foulée bondissante (avec un engagé de genou de la jambe libre vers l’avant et le haut)

 

Depuis plusieurs années nous constatons le fait suivant : Les filles n’arrivent pas à construire un 2ème bond vers l’avant et le haut alors que régulièrement un certain nombre de garçons y arrivent. C’est comme si notre barème (commun aux deux genres) empêchait les filles d’atteindre une note supérieure à 7/10 (dans l’évaluation de la maîtrise d’exécution, les compétences motrices centrées sur le 2ème bond sont notées sur10 points ; 10 autres points sont réservés au chemin d’impulsion)

Le problème est l’origine de cette incapacité pour les filles d’intégrer l’organisation motrice souhaitée.

 

remonter au sommaire b- Hypothèse qui dirige notre étude, qui est une prise de position et qui répond au problème posé

Nous émettons l’hypothèse que le haut du référentiel de la maîtrise d’exécution n’est pas adapté aux capacités physiques des filles.

 

remonter au sommaire c- Cadre de l’étude, modalités des recueils des données

Pour éprouver notre hypothèse, nous allons dispenser un apprentissage systématique et prioritaire de la foulée bondissante (intégrée au Triple Saut) au cours du cycle pour tous les élèves filles et garçons.

En effet une classe de 1ère ES2 de 33 élèves (18G -15F) suivra un cycle d’enseignement de 7 heures de Triple Saut.

Une évaluation diagnostique (en début de cycle), puis certificative (en fin de cycle) seront effectuées par le professeur d’EPS de la classe, Pierre Pezelier.

L’évaluation certificative sera doublée par une observation vidéo dans l’objectif d’analyser plus finement la motricité des élèves.

A la suite du cycle d’apprentissage et à partir de l’analyse vidéo nous répartirons les filles et les garçons dans les différentes conduites typiques présentées dans le référentiel de la maîtrise d’exécution

 

remonter au sommaire d- Analyse des résultats

évaluation diagnostique : 2/33 élèves possèdent une foulée bondissante (FB) intégrée a leur Triple saut : Filles  0 % ; Garçons  6,7 %

évaluation certificative (certifiée par la vidéo) 

 

Conduites Typiques

Filles

Garçons

le 2ème bond est un pas d’élan

7 %

11 %

le 2ème bond est un pas de géant

20 %

17 %

le 2ème bond est une FB avec engagé de genou vers l’avant

66 %

45 %

le 2ème bond est une FB avec engagé de genou vers l’avant et le haut

6 %

27 %

 

Après  un apprentissage systématique de la FB intégrée au Triple Saut, on observe une réelle évolution de la motricité des élèves. Seul un petit tiers d’élèves n’a pas acquis au cours de ce 1er cycle cette technique (il auront un 2nd cycle en Terminale).

On observe aussi « un plafonnement » de la motricité des filles (seule 1/15 fille organise sa FB vers l’avant et le haut). Ce plafonnement n’existe pas chez les garçons (27% de ceux-ci réalisent la conduite la plus élaborée).

Notre hypothèse est confirmée : La réalisation de la FB lors du 2ème bond vers l’avant et le haut ne dépend pas d’un apprentissage différencié (puisque les élèves ont reçus les mêmes contenus d’enseignement). Il provient de la mobilisation de ressources biomécaniques différentes entre les filles et les garçons. L’engagé du genou vers l’avant et le haut nécessite une tonicité musculaire et une résistance à la mise en tension articulo-musculaire lors de la réception au sol qui ne sont pas compatibles avec les capacités physiques de filles de Lycée qui ne sont pas des athlètes de club ou d’UNSS.

 

remonter au sommaire e- Ce que l’innovation peut apporter à d’autres collègues dans leur enseignement en EPS.

De cette innovation nous pouvons extraire quelques principes :

. Il faut se méfier des barèmes de maîtrise d’exécution qui, dans l’objectif recherché d’évaluer les procédures de l’action, évaluent de façon dissimulée et consubstantielle les capacités physiques (qui ne sont pas des procédures !). Les barèmes communs sont rarement « neutres » et sont souvent construits en référence aux garçons car leurs performances dans les activités énergétiques sont souvent au delà de celles des filles.

. Dans le respect des références nationales, il faut s’ancrer sur les caractéristiques de nos élèves et ne pas hésiter à effectuer une observation in situ avec une ou deux classes pour valider un référentiel de conduites typiques. Un dysfonctionnement de même type que celui repéré serait, par exemple en Gymnastique, d’exiger le grand écart facial pour les garçons et les filles afin de leur mettre 8/10 !

. Il est parfois nécessaire de construire pour les filles un référentiel différencié (ou une partie du référentiel) dès l’instant que l’exigence tactique est la même pour tous les élèves. Par exemple, dans notre étude, il est urgent de construire pour les filles une partie de référentiel substitutif à l’engagé du genou vers l’avant et le haut. La prise en compte du pourcentage (%) de la longueur de la FB rapporté à la longueur totale du Triple Saut, nous permettra de discriminer les 66% de filles ayant un engagé de genou vers l’avant (et que celles-ci). La note maximale pourrait être donnée pour une FB approchant 28% du Triple saut. Cette modalité permettra ainsi de mesurer l’efficacité technique (gagner de l’espace lors du 2nd bond proportionnellement aux autres bonds) sans s’appuyer sur les capacités physiques. Nous restons bien là sur les procédures.

 

remonter au sommaire f- Perspectives

. Affiner ce nouveau barème de la maîtrise d’exécution du Triple saut

. Analyser sous le même angle critique le barème de la régularité en Course de Longue Durée.

  

2) - Zoom n°2

Facteur  2 : Construction des référentiels de maîtrise et de performance

Activité sportive : l’Escalade

 

remonter au sommaire a- Constat qui a posé un problème et qui a motivé l’innovation :

On observe un écart de notation significatif entre garçons et filles en défaveur de celles-ci au Bac dans les activités sportives dites « nouvelles » (Escalade Badminton,...). Ce constat a été statistiquement prouvé par Barbara Delmas dans le cadre de son mémoire de Maîtrise STAPS à Lyon 2000 « les écarts de notation au baccalauréat entre les filles et les garçons - étude de cas ».

Cet écart est construit par les enseignants. Cela provient-il d’un apprentissage différencié ? N’y a-t-il pas, à certains moments de l’apprentissage de cette activité, des manières différentes d’acquérir des compétences spécifiques entre garçons et filles et les compétences évaluées prioritairement par les enseignants ne sont-elle pas celles développées par les garçons ?

Dans quelle mesure peut on prendre en compte les similitudes ? / différences ? entre les deux genres ( les évaluations, mais aussi les situations d’apprentissage, le guidage) sans pour autant s’inscrire dans une pédagogie des différences ?

 

remonter au sommaire b- Hypothèses :

Dans un même type de voie, les garçons et les filles adoptent majoritairement des conduites motrices de grimpe différentes.

Si cette hypothèse est validée, nous émettons deux autres hypothèses :

Les logiques organisatrices différentes exigent la construction de voies différentes pour entrer dans l’activité et construire les premières compétences spécifiques.

Les différences psychologiques (affectivité, représentations, prises de risque) entre filles et garçons sont réelles et influent leur manière de grimper.

 

remonter au sommaire c- Cadre de l’étude :

Nous allons éprouver nos hypothèses en tentant d’analyser les logiques organisatrices des élèves, leurs motricités et leurs représentations sociales de l’activité. Les outils d’investigations utilisés seront

. l’analyse d’un questionnaire permettant de repérer les différences de représentations des élèves garçons et filles concernant l’activité escalade.

. l’analyse vidéo : Les élèves seront filmés sur plusieurs voies de niveaux différents avec des prises de vues de dos et de trois quarts. Pour chaque niveau nous ferons l’analyse comparative entre garçons et filles. L’analyse des images ne sera faite que pour la voie verticale en 5a. Cette restriction nous permet de comparer les différentes manières de s’organiser face à la même difficulté. Nous nous sommes centrés sur deux indicateurs qui nous paraissent refléter au mieux l’organisation motrice des élèves

. l’orientation du regard (intervenant dans la prise d’information). Ceci met en évidence l’importance donnée, par les élèves, à la recherche d’appuis manuels et/ou pédestres.

. les appuis utilisés lors des temps d’arrêts. Pour cela nous avons observé la nature des appuis lors des temps d’arrêts nécessaire pour la lecture de la voie. (avec 2 pieds - 1 main ou avec 2 mains - 1 pied).

 

           remonter au sommaire d- Analyse des résultats :

Dans un même type de voie, les garçons et les filles adoptent majoritairement des conduites motrices de grimpe différentes

Cette hypothèse se confirme partiellement.

Nous avons caractérisé à l’aide de la vidéo quatre grandes conduites possibles en Escalade au lycée. Nous pouvons les qualifier de débutants (A), de débrouillés (B), de confirmés (C) et d’experts (D).  Les filles et les garçons (en milieu scolaire) adoptent pour les conduites C et D des façons de faire assez proches  qui ne permettent pas d’établir une différenciation. Cependant il existe de réelles divergences pour les élèves débutants et débrouillés. En effet nous avons relevé l’existence de logiques organisatrices que nous avons appelées « Les pousseurs économiques » et « les tireurs athlétiques » pour qualifier respectivement d’une part des conduites plus féminines et d’autre part des conduites plus masculines. Cette différenciation s’est faite sur les indicateurs de : « gestion des appuis », « d’équilibration », « de coordination d’actions », « de la nature des prises d’information »  et apparaît clairement au sein de conduites typiques hiérarchisées.

Cette hypothèse étant validée pour les deux premiers niveaux d’expertise nous allons répondre aux deux autres hypothèses.

Les logiques organisatrices différentes exigent la construction de voies différentes pour entrer dans l’activité et construire les premières compétences spécifiques

Cette hypothèse se confirme.

Il apparaît que les enseignants proposent quasiment les même contenus d’enseignement, les mêmes voies, les mêmes évaluations quel que soit le genre des élèves. De plus il s’avère que la construction des voies est très majoritairement effectuée par des hommes qui ne prennent que très rarement en considération les caractéristiques spécifiquement féminines. Or l’existence de logiques d’organisation motrice nécessite la construction de voies « plutôt féminines » et « plutôt masculines » pour une entrée plus aisée dans l’activité escalade. Cependant, s’il est nécessaire de proposer des voies adaptées à chacun, il est également important de confronter chaque élève à toutes les situations pour acquérir un répertoire moteur complet . Nous répondons ainsi à notre problématique qui était de réduire les écarts de notes sans s’inscrire dans une pédagogie des différences. Pour cela, nous exigeons, à la fin d’un premier cycle d’enseignement (15 heures), le passage de chaque l’élève sur les deux types de voies et non plus sur celles exclusivement masculines.

C’est pourquoi notre hypothèse est partiellement validée. L’entrée dans l’activité peut être différenciée pour construire les premières habiletés motrices de grimpe à partir des ressources spécifiques filles et garçons mais il faut progressivement s’engager dans une gestuelle la plus polyvalente possible.

Les différences psychologiques (affectivité, représentations, prises de risque) entre filles et garçons sont réelles et modifient  leur manière de grimper.

Cette hypothèse ne peut pas être confirmée ou infirmée.

Nous n’avons pas pu infirmer ou confirmer cette hypothèse car l’analyse du seul questionnaire n’a pu nous fournir assez d’informations sur ce sujet. Il faudrait compléter celui-ci avec des analyses de cas en utilisant les entretiens semi -dirigés comme outils d’investigation.

 

          remonter au sommaire e- Ce que l’innovation peut apporter à d’autres collègues dans leur enseignement en EPS :

La performance est liée à la cotation de la voie réalisée. Une cotation dépend de l’articulation de plusieurs facteurs : l’inclinaison du mur, la grosseur des prises,  leur orientation  et leur densité.

Il nous semble alors important de proposer des voies adaptées aux attentes relatives à la logique organisatrice des garçons et des filles lors d’un premier cycle d’enseignement. Ainsi nous différencierons deux types de voies :

·       Les voies de type 1 conçues pour les « tireurs athlétiques », elles se caractérisent par :

. aux niveaux 4 (a, b, c), des voies verticales avec de grosses prises horizontales.

. aux niveaux 5 (a, b, c), des voies légèrement déversantes, possibilité de petit surplomb, avec des grosses prises orientées de moins en moins horizontalement. La densité est importante, les prises peu éloignées.

. aux niveaux 6 (a, b, c), des voies de plus en plus déversantes avec surplomb, des prises plus petites orientées de façons complexes (verticales, inversées…).

·       Les voies de type 2 conçues pour les « pousseurs(ses) économiques », elles se caractérisent par :

. aux niveaux 4 (a, b, c), des voies positives avec des prises horizontales de tailles moyennes. Il s’agira de mettre en place de grosses prises de pieds qui ne permettent cependant pas de bien se tenir avec les mains (prises plutôt rondes).. aux niveaux 5 (a, b, c), des voies verticales,  avec des prises de mains orientées de moins en moins horizontalement. Les prises de pieds sont de même forme que le niveau 4, leur espacement est accru  pour mettre en jeu les facteurs de souplesse.

. aux niveaux 6 (a, b, c), des voies verticales et déversantes, des prises  plus petites, orientées de façons complexes (verticales, inversées…) et de plus en plus espacées.

Chaque élève, lors de l’évaluation, devra réaliser sa meilleure performance sur les deux types de voies.

 

Barème pour la classe de seconde :

Note sur 20

Couple de cotations réalisées (type 1 et 2)

Note sur 20

Couple de cotations réalisées (type 1 et 2)

20

6C/6C ou 7A/6B

10

5A/5A ou 5B/4C

19

6C/6B

9

5A/4C

18

6B/6B ou 6C/6A

8

4C/4C ou 5A/4B

17

6B/6A

7

4C/4B

16

6A/6A ou 6B/5C

6

4B/4B ou 4A/4C

15

6A/5C

5

4B/4A

14

5C/5C ou 6A/5B

4

4B

13

5C/5B

3

4A/4A

12

5B/5B ou 5C/5A

2

4A

11

5B/5A

1

5 mètres grimpés

 

remonter au sommaire f- Perspectives :

La recherche ne nous a pas permis de confirmer ou d’infirmer la deuxième hypothèse : Les différences psychologiques (affectivité, représentations, prises de risque) entre filles et garçons sont réelles et influent leur manière de grimper. Cette hypothèse pourrait, en fait, être à elle seule le sujet d’une recherche qui articulerait, pour le recueil des données, un questionnaire modifié, des entretiens explicatifs semi-dirigés, une nouvelle analyse vidéo, une évocation mentale des sujets avec support de la vidéo.

  

3) Zoom n°3

Facteur  2 : Exigence attendues par les enseignants

Activité sportive : Le Volley-Ball

remonter au sommaire  a- Constat qui a posé un problème et qui a motivé l’innovation

L’analyse statistique des notes d’EPS au BAC montre qu’il existe un écart de notes significatif entre filles et garçons. Même si notre établissement présente un écart de notation faible, il subsiste en Volley-Ball une différence significative : L’analyse des notes de l’établissement réalisée en 1997 dans le cadre de la recherche INRP sur les pratiques enseignantes concernant l’évaluation au BAC EPS fait apparaître un écart de plus de 2 points dans cette activité : Moy. G = 13,20  (155 notes) - Moy. F = 11,22 (153 notes). Cet écart est construit par l’enseignant quand il met en rapport l’analyse de la motricité des élèves et un référentiel commun .

Au lycée Claude Lebois, en Volley Ball, la performance est évaluée en référence à 4 niveaux de jeu collectif, les équipes étant homogènes en leur sein.

La maîtrise de l’exécution est évaluée sur deux critères : La capacité de l’élève à attaquer la cible adverse (l’attaque) et la capacité à conserver la balle dans son propre terrain pour mettre en jeu un partenaire (coopération). Elle est appréciée en 4 niveaux identiques pour les garçons et les filles.

 

 

Niveau 1

Niveau 2

Niveau 3

Niveau 4

Attaque

Ratée

cadeau

Met en difficulté

Marque le point

Coopération

Ratée

Met en difficulté le relayeur (sauvetage)

Oblige le relayeur à se déplacer

Ne donne pas tous les choix au relayeur

Joue sur le relayeur

Permet tous les choix au relayeur

 

La mixité, semble désavantager les filles dans la mesure où en Volley Ball elles sont souvent cantonnées dans un rôle de faire valoir (passeur) de leur partenaire masculin (attaquant). De ce fait, on constate que les filles attaquent peu souvent l’adversaire et très rarement en smash.

Le problème est donc de prendre en compte ce constat dans le traitement didactique de cette activité dès l’instant que l’on ne se satisfait pas du rôle exclusif de coopération chez les filles

 

remonter au sommaire b- Hypothèse qui dirige notre étude, qui est une prise de position et qui répond au problème posé

Nous émettons l’hypothèse qu’en développant chez les filles la frappe smashée, nous leur permettons d’intégrer les deux derniers niveaux d’attaque du référentiel de la maîtrise d’exécution. Ce choix nécessite une modification des variables didactiques pour que les filles jouent toujours avec les garçons

 

remonter au sommaire c- Cadre de l’étude, modalités du recueil des données.

Pour éprouver notre hypothèse, nous observerons deux temps dans notre démarche :                                            1er temps :Analyse vidéo et questionnement des élèves

Observation de phases de jeu en 4 contre 4, équipes mixtes, pour mettre en évidence :                              . L’influence de la hauteur du filet et de la taille des joueurs sur le nombre de frappes smashées (3 hauteurs de filet utilisées : 2m10-2m24-2m43)                                                                                                                                              . L’influence du placement des joueurs sur le terrain adverse en fonction de leur sexe, de leur taille, de leur niveau de jeu .

Cette observation a été réalisée sur des joueurs se situant à la recherche de la rupture de l’échange.

Questionnement oral à l’issue de chaque séquence de jeu dans l’intention de connaître leurs représentations de l’activité, leurs conceptions de la rupture de l’échange.

2ème temps : Apprentissage systématique et prioritaire du smash au cours d’un cycle de volley-ball pour deux classes de terminales : TBEP de 18 élèves (15F-3G) et TL2 de 26 élèves (23F-3G)

Une évaluation diagnostique (en début de cycle), et certificative (en fin de cycle) seront effectuées.

L’évaluation certificative sera doublée par une observation vidéo pour analyser plus finement les conditions d’apparition de la frappe smashée.

 

remonter au sommaire d- Analyse des résultats.

 

Bilan des évaluations diagnostique et certificative

Conduites typiques dans la recherche de la rupture de l’échange

Évaluation diagnostique

Évaluation certificative

 

F

G

F

G

N’attaque pas l’adversaire

76%

17%

28%

17%

Renvoi placé : balle rapide, espaces adverses visés

24%

0%

26%

0%

Frappe accélérée à 1 main de type smash sans impulsion

0%

0%

36%

0%

Frappe smashée dans des situations pas toujours favorables

0%

83%

10%

66%

Frappe smashée et maîtrisée

0%

0%

0%

17%

 

Après un apprentissage systématique du smash, on observe une nette évolution dans l’intention de jeu : créer la rupture de l’échange pour mettre l’adversaire en difficulté. De plus on observe que les filles ont progressé plus vite que les garçons car elles ont été très motivées par l’apprentissage d’un geste qu’elles jugeaient alors réservé aux seuls garçons.

·       Influence de la hauteur du filet et de la taille des joueurs(euses) :

S’il est vrai qu’une hauteur de filet de 2 mètres encourage la frappe smashée chez les filles, il n’en demeure pas moins vrai que cette hauteur de filet facilite les trajectoires plus tendues lors des renvois adverses et rend la construction de jeu plus aléatoire. L’adoption d’une hauteur de 2m10 pour les joueurs de petite taille et 2m24 pour les plus grands, favorise des trajectoires plus en cloche et permet la construction d’attaques smashées. Les filles ont adopté une frappe de type smashée, pieds au sol, frappe qui met l’adversaire en difficulté car induisant une trajectoire plus tendue et plus longue arrivant dans la zone arrière du terrain adverse. De plus ce type de frappe permet de pallier un manque de puissance fréquent chez la plupart des filles.

·       Influence du placement des joueurs sur le terrain :

en utilisant un protocole de jeu dit « en miroir » (rotation inverse des équipes au service). L’utilisation d’une frappe « smashée » devient possible pour les filles tout en continuant à jouer avec les garçons,.

Notre hypothèse est partiellement confirmée. La frappe smashée pieds au sol est un élément organisateur pour l’attaque de camp adverse. En effet, elle permet aux filles de véritablement s’inscrire dans une rupture intentionnelle du jeu. L’enseignement de cette technique nécessite une adaptation des variables didactiques. L’attaque smashée avec impulsion requiert, elle, des ressources physiques ( vitesse, détente, coordination) et mentales (prise de risque, agressivité) que l’on trouve plus fréquemment chez des joueuses plus expérimentées pratiquant à l’UNSS ou en club. Elle n’est pas à construire en premier chez les filles de niveau scolaire.

 

remonter au sommaire e- Ce que l’innovation peut apporter à d’autre collègues dans leur enseignement en EPS.

Cette étude peut aider à porter un regard nouveau sur la motricité des filles et doit engager l’enseignant vers une pédagogie différenciée plutôt que vers une pédagogie des différences.

Dans notre cas d’étude, pour la compétence « chercher la rupture de l’échange pour mettre l’adversaire en difficulté » on peut très bien admettre deux mises en œuvre : une attaque placée avec touche haute à 2 mains et une frappe smashée avec impulsion  pour les garçons ou frappe smashée  pieds au sol pour les filles ; Ces deux mises en œuvre  ont la même intention tactique, donc la même valeur. C’est en cela que l’on est garant d’un même niveau d’exigence pour tous les élèves filles ou garçons.

De plus,  arriver  à attaquer « comme les garçons » mobilise beaucoup les filles car c’est aussi une conquête pour construire une image positive de soi et développer ainsi un sentiment de compétence. C’est pourquoi l’apprentissage de cette frappe smashée pied au sol est un enjeu qui va au delà d’une simple acquisition technique.

 

remonter au sommaire f- Perspectives

Repérer d’autres expressions de la motricité développées majoritairement par les filles.
         Poursuivre la recherche dans un groupe plus équilibré dans la répartition filles/garçons.

 

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IV- Quelles sont les réflexions et pratiques dans les autres disciplines ?

  1) Enquête auprès des personnels de la cite scolaire Claude LEBOIS

L’équipe EPS, centrée sur l’équité de notation entre les filles et les garçons, a souhaité connaître l’opinion des collègues de l’établissement sur ce problème afin de mettre en évidence les similitudes et les divergences avec les autres disciplines.

112 questionnaires ont été distribués aux personnels enseignants du lycée et lycée professionnel, ainsi qu’aux personnels éducatifs (CPE, aides éducateurs), administratifs et soignants.

 remonter au sommaire a- Le questionnaire :

Après une brève présentation de l’innovation et des cinq facteurs identifiés concourant à la construction de cet écart de notation en EPS, les collègues étaient invités  à répondre à 6 questions :

·       Vous sentez-vous concerné par ce problème ?

·       Si oui, parmi les hypothèses avancées, quels facteurs vous concernent plus directement ?

·       Quels autres facteurs peuvent induire ces écarts ?

·       Avez-vous des exemples de comportements stéréotypés et/ou discriminatoires à l’encontre des filles et des garçons, de la part des élèves eux-mêmes ou des adultes de la cité scolaire ?

·       A partir de ces constats, quels remèdes ou solutions avez vous essayé de mettre en place ?

·       Remarques diverses.

 

remonter au sommaire b- Résultats du questionnaire :

·       10 questionnaires sur les 112 distribués ont été retournés.

6 collègues se disent non concernés dans leur discipline mais, parmi ceux-ci :

1 enseignant avoue « ne pas choisir les mêmes textes dans une classe à dominante filles  et à dominante garçons »  et cela en raison « des centres d’intérêt » différenciés.

1 autre confirme l’existence « d’écarts de notation entre les différentes sections » .

4 collègues ont répondu favorablement et se sentent concernés par 3 des 5 hypothèses proposés :

·       Hypothèse 2 : Des référentiels d’évaluations ne prennent pas en compte les différences génétiques, sociales et culturelles des filles et des garçons.

« Adapter les supports d’enseignement aux élèves concernés » serait une solution sans doute efficace, mais « pas toujours possible » car l’enseignant est « lié par les exigences d’examen ».

·       Hypothèse 3 :Les exigences attendues par les enseignants.

Une certaine image du masculin et du féminin continue d’être véhiculée dans et par l’école malgré les efforts notables pour modifier les comportements. « Il y a encore du travail à faire pour que les filles se dirigent en masse vers les études d’ingénieur et les garçons en littéraire ! ». Les collègues se disent encore très imprégnés par une représentation « de métiers masculins et féminins » et en lycée professionnel, « les élèves sont orientés en fonction des souhaits des maîtres de stage »

·       Hypothèse 5 : Le genre de l’enseignant évaluateur (homme ou femme).

Il s’agit là du regard que les collègues portent sur leurs élèves en fonction de « notre vécu, de notre personnalité, de notre sensibilité ».

Ces constats, plus ou moins formalisés, laissent ces 4 collègues désemparés car ils ne savent pas quels remèdes apporter pour agir ou tenter d’agir contre ce phénomène. Les remédiations, qui sont autant de tentatives isolées, sont souvent du domaine du Dire : « répéter et répéter aux filles..... » et non de celui du Faire.

 

remonter au sommaire c- Analyse des résultats :

Les 102 questionnaires non rendus  sont révélateurs, au mieux de la perplexité dans laquelle nous avons plongé nos collègues, au pire du manque total d’intérêt concernant la division sexuée des savoirs.

Nous pensons que ce non intérêt se construit principalement autour de l’ignorance de ces faits cachés. Il est très probable que les textes officiels récents sur ce sujet sont peu ou pas consultés par la communauté éducative. Cette attitude quasi générale peut être résumée ainsi : « Le problème ne se pose pas puisqu’il n’existe pas » !

En effet, si certains collègues nous ont rencontrés pour comprendre notre démarche, ils ont admis ne s’être jamais posé la question par méconnaissance du problème et de ses enjeux, par le profond ancrage des habitus, par un reste de fatalisme qui laisse à penser que l’ordre des choses est immuable. Cependant ces quelques collègues, ouverts à notre discours, ont reconnu que notre sujet les interpellait et les questionnait.

 D’autres, plus mal à l’aise nous ont pris pour des « enfonceurs de portes ouvertes ! » : « Bien sûr que filles et garçons sont différents et alors, où se situe le problème ? »

Dans ce cas, le poids de la représentation souvent archaïque des rôles sociaux reste implicite et, renforce les partages traditionnels de taches, de temps et d’espace entre les genres.

  

2)  Conclusion

Cette innovation en EPS apporte de nouveaux faits de connaissance aux enseignants.

Une innovation transdisciplinaire sur ce sujet semble être la suite logique de notre étude.

Cela devrait engager dans notre établissement une nécessaire prise de conscience pour qu’au delà du DIRE s’instaure le FAIRE .

Il en va aussi du sentiment de justice que peuvent vivre les élèves et notamment les filles à notre égard.

Marie Marion, Francis Bergé, Pierre Croiset, Pierre Pezelier,

Professeurs d’EPS au lycée polyvalent Claude Lebois

le 30 / 05 / 2001, à St-Chamond

 

 

 

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V - Annexes

Hypothèse 1 : Une programmation privilégiant les APSA historiquement masculines participe à la construction de cet écart

Facteur 1 : Nature de la programmation

La sociologie sportive (Pociello 1987, Combaz 1992) a montré qu’il existe une différenciation des pratiques sportives selon le sexe.    Les engagements sportifs des hommes et des femmes ne sont pas similaires. Delmas (1990) rappelle que les femmes pratiquent plus volontiers dedans, dans des espaces fermés, dans un objectif d’hygiène, des activités esthétisantes, des pratiques sans engins, des pratiques d’eau et proche du sol. A contrario, les hommes pratiquent plus volontiers dans des espaces ouverts, dans un objectif de dépense d’énergie, des activités à risques, des pratiques techniques et/ou motorisées, des pratiques d’air avec des vols.

Cependant, Davisse (2000) montre que la plupart des activités sportives s’ancrent dans les sociaux masculins et excluent de fait les femmes de ces pratiques majoritaires «Elaborées dans l’histoire des hommes, la plupart des pratiques portent profondément cette marque historique de modèles sociaux masculins ».  

Il en est de même au sein de notre discipline : La prise en compte de ce modèle féminin (le  fénimin singulier - défini par Davisse (1986) - qui ne saurait, là aussi, être exclusif) est très largement minoré par les programmations que construisent les enseignants d’EPS en Lycée. Pour Combaz (1992), « la culture transmise à l’école ne correspond pas tout à fait aux attentes des filles ». La culture corporelle ne revêt pas à leurs yeux la seule logique sportive alors que c’est celle-ci qui est majoritaire dans les enseignements scolaires.

Bergé (2000 b), dans une étude statistique de l’évaluation certificative au Bac dans le  département de la Loire, montre que dès 1997 (2 années seulement après les textes de 1995 !), la gymnastique est progressivement évincée des Lycées après l’avoir été des Lycées professionnels. la Danse reste confidentielle car trop connotée sexuellement par les enseignants avant de l’être... par les élèves.

Il ne s’agit cependant pas de programmer pour les filles que des APSA exclusivement féminines. Pour Davisse (2000), les filles ont à gagner « à se frotter à l’affrontement, au risque, pour se forger des images diversifiées des possibles des femmes ».

Hypothèse 2: Des référentiels d’évaluations ne prenant pas en compte les différences génétiques et les capacités motrices différenciées des filles et des garçons participent à la construction de cet écart

Facteur 2 : Construction des référentiels de maîtrise et de performance

Dans un article de la revue EPS, Ringard (1988) annonce une rupture avec la table Letessier dans la construction des notes attribuées à la performance dans les activités métrées et chronométrées. En effet, les barèmes existants en athlétisme depuis 1987 ont été élaborés à partir de la population spécifique des garçons et des filles grâce à un traitement statistique de 30953 performances d’élèves prises dans 5 académies. Ces nouveaux barèmes prenaient donc en compte les possibilités réelles des élèves et surtout leurs différences génétiques entre filles et garçons. Mais ce souci d’adaptation à une population spécifique est-il présent dans l’évaluation des activités dites nouvelles ?

Dans une étude de cas d’un Lycée, Delmas (1990) note que les dispositifs d’évaluation permettent d’amplifier l’écart de notation et cela notamment dans les activités nouvelles (Escalade, Badminton).

Ancel (1999) a montré qu’en Volley-Ball, au niveau confirmé, les moyens de mettre en difficulté l’adversaire différait statistiquement selon si on était une élève fille ou un élève garçon. (balle d’attaque jouée placé pieds au sol pour les filles ? balle d’attaque frappée en suspension pour les garçons). De la même façon, Pezelier (2000), a identifié deux motricités différentes chez les filles et les garçons lors de la grimpe débutante en escalade. Cette expression différente de la motricité s’atténue ensuite avec le degré croissant d’expertise.

Hypothèse 3 : Les habitus traditionnels de répartitions des taches et des compétences entre filles et garçons véhiculées par les enseignants participent à la construction de cet écart

Facteur 3 : Exigences attendues par les enseignants

La sociologie des inégalités sexuelles (notamment les recherches anglo-saxonnes des années 80)  montre que les personnels du système éducatif contribuent largement à créer des différences et des inégalités entre Filles et Garçons au cours de leur scolarisation.

L’idée que se font les enseignants des aptitudes supposées des élèves des 2 sexes influe sur leurs contenus dispensés. Pour Mosconi (2000), il existe un curriculum officiel (ensemble de contenus d’enseignement organisé en cursus) et un curriculum caché qui organise la différenciation des savoirs selon le genre (fille ou garçon) en transmettant de manière diffuse des habitus par l’intermédiaire des manuels, des procédures d’enseignement, de l’attention accordée prioritairement aux garçons. En effet, dans une recherche récente, Jarlégan (2000) a démontré que dès la classe de CM2, les filles et les garçons sont traités de façon différente. Ces derniers, reçoivent plus d’attentions, ont plus d’interactions avec le professeur, reçoivent plus de rétroactions sur leur travail que les filles. La façon de donner les consignes est aussi différenciée : En mathématiques, les instructions sont majoritairement pour les Filles, l’explication des principes sous jacents est plutôt réservée aux Garçons. L’évaluation est aussi différenciée au profit des Garçons.

Pour Perrenoud et Montandon 1998, les filles développeraient en retour des stratégies de réaction plus ou moins conscientes face aux exigences contradictoires véhiculées par les enseignants : « soyez des filles » (et acceptez votre position subordonnée) et « réussissez scolairement comme les garçons » : Ces auteurs notent chez les filles des stratégies de survie, de compensation ou de rébellion

Hypothèse 4  : La permission accordée aux élèves de choisir leurs APSA au sein de leur unités d’enseignement (menus) participe à la construction de cet écart

Facteur 4 : Choix par l’enseignant ou les élèves des APSA du menu

Lors d’une étude cas, Delmas (2000) a montré que l’effet culture (expérience préalable des APSA qu’ont les élèves) jouait un rôle moindre dans les activités traditionnelles mais plus fort dans les activités nouvelles (Badminton, Escalade)

Bergé (2000 a) a réalisé  en 1997 une analyse comparée des 2 établissements présentant le plus petit (0, 52) et le plus grand (2,34) écart de notation du département de la Loire. L’étude montre qu’il existe de nombreux points communs dans la composition des équipes EPS et dans l’organisation de l’enseignement de l’EPS mais cependant deux points divergents ont été identifiés : L’établissement présentant le plus petit écart impose un menu à chaque classe administrative de Terminale au sein duquel la gymnastique est présente à 80%. Dans l’autre établissement les élèves choisissent leur menu parmi 3 propositions de l’équipe pédagogique où la gymnastique est absente.

Hypothèse 5  : L’enseignante plus que l’enseignant, quand elle évalue, participe à la construction de cet écart

Facteur 5: genre de l’enseignant évaluateur (homme ou femme)

Une analyse statistique précise réalisée par Bergé (2000 a) montre qu’une collègue femme, plus qu’un collègue homme a statistiquement plus de chance d’accroître l’écart de notation entre les filles et les garçons au profit de ces derniers. Une hypothèse explicative peut être avancée pour  expliquer ce phénomène :

« Concernant l’accroissement de l’écart des notes quand il s’agit de collègues femmes, nous pouvons émettre l’hypothèse que la notation se réalise partiellement, mais toujours, en rapport à sa motricité ou à l’image historique de sa motricité.

Les enseignantes d’EPS étaient des élèves filles « atypiques » au sens défini par Annick Davise. Les meilleures élèves filles ( atteignant « le produit norme » de Noizet et Caverni 1978) sont notées à l’aune de la motricité ou des images motrices d’excellence que se sont construites les collègues femmes.

Les garçons étant souvent au delà de l’expression de cette motricité repère, les notes sont alors plus hautes. Il semblerait que les collègues hommes arrivent un peu mieux à prendre en compte deux motricités spécifiques dans les limites des écarts constatés. Il doit être plus facile d’apprécier une expression de la motricité (véhiculant la vitesse, la force, la puissance) en deçà qu’au delà.    

Enfin ce phénomène semble amplifié par la dynamique d’équipe pédagogique. Une équipe réellement mixte jouerait un rôle de régulation en ce qui concerne l’écart de notation entre les filles et les garçons.

Ce rapport intime à son histoire personnelle avait déjà été identifié il y a 25 ans par S. Bernfeld (Sisyphe ou les limites de l’éducation, Payot, Paris 1973). Cet auteur définissait la relation pédagogique avec 4 personnages : « l’enseignant, l’élève qu’il voit, celui qu’il était dans celui qu’il voit et celui qu’il n’a pas été dans celui qu’il voit. »

Plus près de nous en 1998, pour  L. Ria et J. Fiard (Caractéristiques des élèves en EPS, revue EPS n° 269), « tout jugement écartèle l’évaluateur... qu’est ce qu’être fort ? habile ? coordonné ? dans le tissu flou des acceptions possibles, s’interpénètrent alors les propres représentations de l’enseignant, voire de ses fantasmes, produits de ce qu’il fut ou aurait aimé être...».

C’est aussi dans le champ très large de la subjectivité que se construisent ces écarts de notation entre garçons et filles. »

Davisse (2000) conforte cette analyse. Selon elle, bien que l’enseignant soit décrété neutre de conviction comme de genre il laisse place à une représentation de l’élève fortement habitée par l’image de l’élève que l’enseignant fut lui-même. Elle ajoute que « la non appétence des APSA des adolescentes  n’est pas toujours facilement saisie par les enseignantes (souligné par nous) en EPS. Celles-ci ont parfois du mal à identifier un obstacle symbolique : le hiatus entre image de soi et image du sport qu’elles ont déjà surmonté. » 

 

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VI - Bibliographie :

Ancel Bruno 1999 « Les écarts de notations entre filles et garçons au Baccalauréat - Vers une réduction de cet écart en Volley par la prise en charge des différences dans la rupture de l’échange »  Mémoire PLC2 IUFM de Lyon

Bergé Francis 2000 a, « Ecart de notation entre garçons et Filles dans la Loire » dans « Equité et arrangements évaluatifs : certifier en Education physique et Sportive » sous la direction de David Bernard. Site INRP :  http://www.inrp.fr/publications/en_ligne/david

Bergé Francis 2000 b, « Composition des menus du BAC EPS dans la Loire Pourquoi ? Comment ? » dans « Equité et arrangements évaluatifs : certifier en Education physique et Sportive » sous la direction de David Bernard

Site INRP :  http://www.inrp.fr/publications/en_ligne/david

Clément Jean-Paul 1998 « Pratiques corporelles féminines, différenciation sexuelle et gestion de la mixité en EPS (1945-1980) » dans « Histoire du sport féminin » Tome 2 textes réunis par Arnaud Pierre et Terret Thierry coll : Espaces et Temps du Sport  ed. l’Harmattan

Cleuziou Jean -Pierre 2000 « L’analyse des menus et des notes » dans « L’éducation physique et sportive : certification au Baccalauréat » (sous la direction de Bernard David) Documents et travaux de recherche en éducation N°39 Ed. INRP

Combaz Gaston 1992 « Sociologie de l’Education sportive » coll : Pratiques corporelles Ed. PUF

David Bernard 2000 (sous la direction de) « L’éducation physique et sportive : certification au Baccalauréat » Documents et travaux de recherche en éducation N°39 Ed. INRP

Davisse Annick Janvier 1986 Revue EPS N° 197 « Les mixités en EPS »

Davisse Annick et Volondat Michel Juillet 1987 revue EPS N° 206 « Mixité, pédagogie des différences et didactiques »

Davisse Annick : 2000 « au temps de l’école l’éducation physique et sportive des filles » dans Louveau Catherine et Davisse Annick  « sports, école société : la différence des sexes » coll : Espaces et Temps du Sport  ed. l’Harmattan

Delmas Barbara 2000 « Les écarts de notation en EPS au Baccalauréat entre Filles et Garçons. Une étude de cas au Lycée A. de ST-Exupéry » Mémoire de Maîtrise Education et Motricité UFRSTAPS Lyon

Durand Marc 1999 « Développement professionnel et formation des professeurs d’EPS » dans Colloque d’Antibes de Dec1998 : « Intervention dans le domaine du sport et de l’EPS »

Jarlégan Annette 2000 « Les interactions verbales maître élèves en cours de mathé -matiques » dans « Filles et garçons à l’école : une égalité à construire » CNDP ouvrage collectif sous la direction de Françoise Vouillot, collection « Autrement dit »

Mosconi Nicole : 2000, « Femmes et savoir » ed  l’Harmattan

Observatoire Académique des examens de l’Académie de Lyon 1998 (sous la direction de Labiche Jacques et Nesme René) « les écarts de notation entre garçons et filles dans la Loire » dans « Education Physique et Sportive : Evaluation - Notation aux examens, quelques éléments de réflexion à propos des écarts de notation » ed . Rectorat de Lyon (ce document est disponible sur le site Internet de l’Académie de Lyon)

Perrenoud et Montadon 1988 « Qui maîtrise l’école ? » coll réalités sociales ed Lausanne Pézelier Pierre 2000 « Diminution de l’écart de notation filles-garçons en Escalade » Mémoire PLC2 IUFM de Lyon

Ringard Charles 1988 «les nouveaux barèmes dans les examens scolaires» Revue EPS n° 209
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Equipe innovante :

Marie Marion, Francis Bergé, Pierre Croiset, Pierre Pézelier, Professeurs d’EPS
Coordonnateur du projet d’innovation : Francis Bergé

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