II - Crée son site web avec
une équipe d’élèves et de professeurs
Un atelier "Site web
du collège" a été créé dans le cadre du foyer. Il travaille au
CDI une fois par semaine.
Il affronte de réelles
difficultés mais produit régulièrement, contre vents et marées, les
pages du site. Nous avons constaté que faire un site Internet avec les
élèves dans notre situation particulière est une entreprise vraiment
difficile.
Elle conjugue les
difficultés traditionnelles de l’entreprise journalistique, puisque la
publication d’un site web s’apparente par beaucoup d’aspects à la
publication d’un journal de l’année, et les difficultés liées à l’appropriation
d’un média nouveau. Dans notre situation particulière notre
inexpérience, le peu d’enseignants ayant des connaissances
informatiques et le retard de notre infrastructure technique étaient un
lourd handicap.
1 Ce qui aide
Notre atout
principal était au départ que les 2 enseignants moteurs du projet
avaient chacun créé un site web. Ils ont cependant constaté qu’il existe une grande
différence entre bricoler un site chez soi, pour soi, ou même pour qu’il
devienne le site du collège, et réaliser ce site avec les élèves.
Le choix avait été fait
dans l’établissement d’adopter deux fois par semaine un espace de 2 heures pendant le temps de
restauration pour permettre l’existence d’ateliers.
Les adultes ont la
possibilité de correspondre par Internet pour mettre au point les
interventions
Le fait que l’équipe
soit constituée de personnels différents et donc complémentaires : français, dessin,
technologie, anglais, documentation…
Le fait que le travail
effectué en français, en SVT et au CDI ne dépende pas directement de l’existence
effective du site et puisse se poursuivre indépendamment.
Le fait qu’il y avait
toujours un travail réalisable par les élèves sans aide : la
saisie des formulaires remplis par les lecteurs du CDI. Les participants
à l’atelier pouvaient faire ce travail en cas d’impossibilité de
faire quelque chose de plus productif
Le fait de faire partie d’une
équipe plus large : le Programme National d’Innovation, de
recevoir quelques crédits et d’avoir périodiquement la visite d’une
accompagnatrice. Cela assure finalement des moments de concertation
institutionnels.
2 Ce qui n’aide pas
a - Ce qui est propre à notre
établissement
Problèmes de
disposition des postes informatiques et de connexion :
pour l’atelier :
les 2 lieux sont distants de 2 étages ce qui suppose 2 responsables pour
l’atelier qui ne peuvent communiquer pendant son déroulement : la
documentaliste est au CDI au rez-de-chaussée, le professeur de
technologie dans la salle informatique.
Une seule connexion à
Internet : au CDI sur le poste de la documentaliste.
3 postes seulement au CDI
10 postes en salle
informatique au 2ème étage (non reliés au CDI, non reliés à
Internet).
La documentaliste a
rarement le temps d’aller voir ce qui se fait dans cette salle puisque
le CDI ouvre immédiatement aux élèves l’après-midi.
Le professeur lui a cours
de 2h à 5 h et n’a pas le temps de venir la voir.
Manque de matériel ou
de logiciels
En l’absence de crédits
au départ du projet, nécessité de trouver des logiciels gratuits, donc
peu ou pas de documentation, de modèles simples à utiliser, etc… et la
nécessité de nous former à ces logiciels par essais successifs.
Nombre insuffisant de
logiciels de bureautique.
Au CDI un poste est vieux
et ne peut pas être utilisé comme les autres
En l’absence de graveur
il est difficile d’emporter des pages comportant des images d’un lieu
à l’autre pour travailler (le graveur a été commandé à temps mais
il a fallu un an avant qu’il soit utilisable). La sagesse consiste
sûrement à attendre d’avoir réuni toutes les conditions avant de se
lancer dans ce genre d’aventure…
Etablissement trop
petit, pas assez de professeurs
Les deux personnes qui
assument l’aspect pratique de la construction du site Internet et
animent l’atelier avec les élèves sont le professeur de
technologie et la documentaliste, tous deux nouvellement arrivés dans le
collège.
b - Ce qui peut arriver partout
Manque de personnel
La documentaliste est
entrée dans le projet alors qu’elle était secondée par une
aide-éducatrice, la deuxième année elle assume seule au CDI le travail
réparti auparavant entre deux personnes et ne peut plus s’absenter pour
régler facilement un problème, ou rencontrer un des membres du projet…
La deuxième année le
professeur de technologie effectue la plus grande partie de son service
dans un autre collège. Le second professeur de technologie le remplace
parfois mais ne connaît pas Internet.
Manque de formation
Les professeurs ont
beaucoup de mal à obtenir une formation informatique de base ne serait-ce
que pour apprendre à se servir des logiciels de bureautique.
Les formations existantes
pour la création de site web (mercredis du CARIP) sont trop
superficielles.
Or pour travailler avec
les élèves il ne faut pas être arrêté par des problèmes techniques,
il faut maîtriser les logiciels, le passage d’un logiciel à l’autre,
savoir archiver et retrouver les fichiers, insérer des images à des
formats différents, des fonds d’écrans. Il faut pouvoir installer sur
chaque poste un état récent de la page sur laquelle travaille le groupe
d’élèves afin qu’il puisse ajouter sa participation.
Quand un groupe a terminé
il faut pouvoir rapatrier son travail grâce à une disquette ou un CD-ROM
sans écraser l’apport d’un autre élève et enfin procéder au
téléchargement.
Les élèves travaillent
sur les postes du CDI sans protection, il faut pouvoir être capable de
rattraper des fichiers effacés ou modifiés par erreur.
Impondérables
La première année le
professeur de technologie, seul détenteur du savoir-faire initial en
matière de création de site web, a du s’absenter assez longtemps
pour cause de maladie, nous ne pouvions par faire grand chose, le projet a
piétiné six mois.
c - Ce qui est propre à ce genre de
projet
Manque de temps
Lorsque l’atelier est
terminé, quand les élèves sont partis, après avoir corrigé les fautes
en tout genre (pour l’instant il nous paraît difficile de leur rajouter
cette tâche qui ralentirait trop les choses), après avoir demandé l’accord
des professeurs concernés par la publication, il reste à télécharger
les fichiers sur le serveur de l’académie. Il faut donc trouver un
moment au calme qui coïncide avec une plage horaire où le serveur est
accessible, etc…
Manque de concertation
Nécessité de
concertation avec les autres membres de l’équipe mais en même temps
impression parfois de saturation. Les heures d’atelier ne sont pas
rétribuées, il est donc toujours délicat de demander de l’aide, ne
parlons pas des heures de concertation…
Pour résumer
Avec les élèves il faut
maîtriser la technique, prévoir les désirs, anticiper les bêtises, se
débrouiller en toute occasion, résister au découragement collectif ou
personnel, conserver l’envie d’un résultat quand plus personne n’y
croit.
Seule une équipe peut y
parvenir, comment maintenir sa cohésion ? En l’absence de
réunions de concertation quelqu’un doit faire le lien entre tout le
monde, trouver le moyen de parler des besoins liés au projet sans
empiéter sur les temps de repos indispensables.
3
Construction du site lui-même : chronologie :
a - Déroulement de l’atelier
la 1ère année : une naissance difficile
Nous avons constaté que malgré l’enthousiasme de
départ, une fois passées les premières séances où l’on visite les
autres sites pour s’en inspirer ou les critiquer, où l’on conçoit
les différentes rubriques du site et où l’on se met d’accord sur un
organigramme, il faut arriver à la naissance proprement dite des
premières pages.
Nous n’arrivions pas à nous lancer même si nous
avions conscience que c’était devenu indispensable car quand il n’existe
rien, on ne peut rien montrer et personne ne peut se représenter vraiment
les choses. Mais quand les initiateurs eux-mêmes balbutient le B.A. BA de cet art
difficile, quand le simple choix à 12 de la couleur d’un fond et d’une
police prend 1 /2 heure et laisse tout le monde frustré, il y a des
moments très pénibles où l’on a l’impression que rien n’avance,
que l’on perd son temps et la tentation d’abandonner est forte ( effet
classique dans tout projet).
Nos compétences n’étaient effectivement pas
suffisantes, nous faisions trop d’erreurs de manipulations, nous en
étions au tâtonnement. Il nous fallait une plage de temps plus
importante qu’une heure et un certain calme pour en arriver à créer
enfin quelque chose de visible.
Nous nous sommes donnés une date. Le Principal avait
décidé une journée porte ouverte au mois de juin, notre site devait
donc être présenté aux parents ce jour là.
Nous avons donc construit le site à deux, chacun chez
soi, en proposant des effets et en essayant d’en résoudre les
problèmes techniques. Il y a eu d’ailleurs un moment non négligeable
de mise au point entre nous. Un travail de création effectué par deux
adultes de formation, et de savoir-faire très différents demande des
efforts d’adaptation. Nous avons donc appris à nous mettre d’accord
et à être efficaces.
Nous étions un peu culpabilisés de n’avoir pas
réussi à franchir cette étape avec les élèves mais la rencontre avec
d’autres équipes innovantes qui avaient un projet voisin du nôtre nous
a rassurés. Des professeurs d’anglais qui avaient le projet de
concevoir des CD-ROM avec leurs élèves se sont retrouvés dans la même
situation que nous et ont réagi de la même manière. Ce qui ne veut pas
dire qu’il n’est pas possible de s’y prendre différemment mais c’est
une épreuve sérieuse à la quelle il faut vraiment se préparer.
L’année s’est donc terminée par la présentation
officielle du site du collège aux acteurs du collège : enfants,
parents, professeurs et membres de la communauté éducative présents.
Une jolie photo du couloir du collège, un organigramme quelques pages
encore bien maigres mais qui invitaient à s’épancher…
b - Deuxième
année : la documentaliste vit un cap difficile
C’est l’exemple d’un moment où la réunion de
concertation m’a vraiment été utile et où la présence dans l’équipe
de personnels différents à montré tout son intérêt.
J’animais l’atelier un jour par semaine, souvent
seule avec les élèves. Après deux défections, des absences de
participants et une séance assez calamiteuse où rien n’avait avancé
et où j’avais l’impression qu’ils étaient tous prêts à
abandonner, j’étais découragée.
La venue de l’accompagnatrice a été l’occasion de
parler de la situation ce que je n’aurais peut-être pas fait dans d’autres
circonstances parce que je n’avais pas le temps de voir mes collègues
suffisamment longtemps pour aborder quelque chose qui me tenait aussi à cœur
et dont j’étais aussi mécontente. Je pense que j’avais peur de finir
par me rendre compte que cette situation n’avait pas de solution et que
nous avions tout simplement été naïfs de croire que nous pourrions
passer au dessus de tant d’obstacles dont le moindre n’était pas mes
difficultés techniques.
Mais le fait d’avoir à expliquer le problème dans
lequel je me trouvais a permis de prendre de la distance, de démêler les
besoins les plus urgents et surtout l’intervention du principal adjoint
a été un grand soulagement.
Il n’intervenait pas sur un plan technique qui
finissait par m'obnubiler et m'écœurer mais sur le plan humain qui
était finalement le besoin principal : ne plus être seule à
préparer ces séances et pouvoir parler à quelqu’un des difficultés
pédagogiques de l’entreprise pour réfléchir à des solutions.
Il a proposé la collaboration de Sébastien,
aide-éducateur, non pas pendant l’atelier puisqu’il est pris
par des activités sportives avec les élèves demi-pensionnaires, mais 2
heures le matin du jour où a lieu cet atelier.
Nous n’avions pas pensé à lui jusqu’alors justement
parce qu’il est toujours pris aux heures d’atelier et surtout parce qu’il
disait ne rien connaître aux sites Internet. En fait, étant donné ses
connaissances informatiques importantes, il lui a fallu très peu d’explications
pour être à l’aise.
Sa présence durant deux heures a permis de déblayer
quelques tâches fastidieuses et indispensables : relancer la
société informatique pour obtenir un graveur enfin efficace, faire des
copies du site et les installer sur les postes de la salle informatique,
créer des fichiers pour chaque élève, rédiger des procédures … Elle
m’a soulagé de problèmes difficiles de maintenance avant qu’ils ne
tournent au cauchemar…
Son expérience personnelle est précieuse :
élève il a appris l’informatique par lui-même au collège. Nous avons
réfléchi au problème et constaté qu’on ne peut installer les
élèves devant un poste en leur montrant comment s’y prendre, ils n’ont
aucune attention, ils s’ennuient. D’autre part les lâcher tout seuls
est impossible (la documentation n’existe pas pour ces tâches trop
particulières à la configuration locale). La solution qui nous est
apparue a été de former quelques élèves au moment où ils ont un
contenu à mettre en ligne (présentation de leur ville, compte-rendu de
stage…). Ensuite, dès qu’ils ont compris et qu’ils ont terminé
leur tâche nous leur demandons de se séparer et d’aider un nouveau
groupe à mettre en page son propre article. Le plus intéressant dans ce
fonctionnement est que l’adulte devient personne ressource et que l’élève
est constamment en situation de projet. J’ai demandé aussi que les
groupes qui prennent en charge une page comporte toujours une part de
mixité en argumentant que le site doit plaire à tout le monde. En tant
que documentaliste j’ai expérimenté ces groupes mixtes lors des
séances de découvertes du CDI en sixième et je trouve les résultats
bien meilleurs. La première fois il y a des grincements de dents mais
ensuite ça s’arrange.
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