Collège ALAIN
P. N. I. prévention
de la violence
Groupe Parole
Académie de LYON
Collège ALAIN, 1, rue
de Valence, 69190 Saint-Fons
Tel :
04-72-89-00-79
P. N. I. prévention de
la violence
Groupe Parole
Sommaire :
1 LES ORIGINES
2. LES ACTIONS
3. LES CONDITIONS DE FONCTIONNEMENT
4. APPROCHE ET THEORIE PSYCHODYNAMIQUE
Réf. bibliographiques
CONCLUSION
ZOOM :
LE BINOME
1 LES ORIGINES
1. Le collège Alain (69 Saint Fons)
Le collège
ALAIN de Saint-Fons est situé dans la proche banlieue de Lyon où les
difficultés sociales sont partout présentes. De taille importante (800
élèves dont 80 de SEGPA), le collège comprend un public hétérogène
(26 nationalités) et les catégories socio - professionnelles des
parents appartiennent à la tranche « défavorisée » pour
80 % d’entre eux. Les évaluations à l’entrée en sixième et la
réussite au brevet des collèges restent très en dessous de la moyenne
académique même si on peut noter une amélioration sensible au cours
des deux dernières années.
En Septembre 1997, un
climat de tensions internes et externes prédomine. Si le dialogue
existe, il est de l’ordre de la discipline et des exigences par
rapport à l’élève. Certains élèves sont “ étouffés ” par le
climat ambiant : on assiste très souvent à un renfermement sur soi.
Les équipes en place sont très actives au niveau de leur mission
éducative ; toutefois un manque de cohérence dans les décisions
prises, tant au niveau disciplinaire qu’au niveau pédagogique, nuit
à la relation à l’élève et à la cohésion de la communauté
éducative.
2. La naissance du projet
Dans cette ambiance les problèmes se
multiplient : incivilités, non respect des règles, élèves
difficiles à gérer, élèves perturbateurs ou démobilisés. Plusieurs
adultes de l’équipe éducative décident alors de travailler
ensemble, à l’élaboration de solutions autres que celles des
sanctions.
Une des
constatations faite au sein de l’établissement est que l’élève
est presque toujours considéré comme l’élément d’un
groupe (groupe du quartier, groupe sportif, groupe classe, groupe des
bons élèves, groupe des mauvais élèves...), et jamais comme un
individu dans sa globalité. Il semble en particulier que l’écoute
fasse défaut.
q
C’est ainsi
que sont nés des groupes de paroles avec l’ensemble des délégués,
regroupés sur trois classes (6 élèves) et des adultes (professeurs,
CPE, assistante sociale, surveillant, médiatrice municipale).
Le
groupe est un lieu de dialogue et non de prise de décision et encore
moins de sanction. L’objectif est de créer un espace de parole, de
dialogue et d’écoute, où le droit de réserve et de non jugement
constitue un principe de base, afin de favoriser des échanges entre
adultes et jeunes, sur des thèmes apportés par ces derniers concernant
leur vie dans l’établissement. Ces rencontres ont permis d’aborder
les thèmes suivants :
-
la violence au
collège et en dehors : les élèves victimes
-
les élèves
perturbateurs en cours et dans la cour
-
les vols, le
racket, la loi du silence, l’esprit du leader, l’aide des grands aux
plus petits, aux plus faibles
-
les règles au
collège – les locaux au collège
-
les professeurs
qui ne « tiennent » pas leur classe
-
les différents
niveaux de classe, la SEGPA et le collège
-
le rôle du
délégué (ses limites), les élections.
q
Parallèlement,
une action de prévention était menée auprès des classes de 3ème
SEGPA, par des intervenants de l’Association NEMO (infirmière
psychiatrique et psychologue). Un des partenaires du collège est en
effet NEMO, un centre de prévention des toxicomanies. Un travail de
connaissance, de reconnaissance de soi et des autres s’est mis alors
en place, sur quatre séances.
q
Enfin, un stage
autour de la violence, a été suivi par des membres volontaires de l’équipe
éducative.
Ces actions ont
ouvert la voie à une réflexion commune, à une prise de conscience
forte, et à l’élaboration d’un projet : Paroles, Parole. Il s’est
installé de façon institutionnelle, au sein de l’établissement dès
septembre 1998. Plusieurs rencontres avec les différents partenaires
adultes intéressés, avaient permis d’affiner la théorie, les buts,
les objectifs, la mise en place de ce projet aboutissant à un texte de
référence (ci-dessous),
Prévention au collège :
classes de 6ème
(Centre
Nemo (G. Eyraud et J. Rorato, infirmières psychiatriques)
Constats
L’entrée en
sixième est une période spécifique et singulière dans la scolarité
de l’enfant et ce pour plusieurs raisons :
-
le changement d’établissement,
l’augmentation de sa taille par le nombre d’élèves, sa situation
géographique souvent hors du quartier, déstabilisent le jeune
collégien,
-
passer d’un
enseignant unique – l’instituteur – à plusieurs professeurs,
oblige l’enfant à changer de repère constamment et à perdre une
certaine sécurité,
-
l’emploi du
temps de l’élève ponctue le changement de professeurs et de salles
et introduit une différence de scansion des horaires pour chaque
classe. L’enfant va vers une gestion propre de son temps,
-
le changement
de statut : il était le grand de l’école primaire, il devient
le petit du collège, pousse l’enfant à se confronter à l’adolescent
-futur adulte -, l’enfant qui avait acquis un certain contrôle
sur son corps, une certaine maîtrise de lui-même et de son
environnement, voit avec la puberté son corps se sexualiser, se
métamorphoser brutalement. La période de l’adolescence, véritable
travail psychique de séparation et de maturation, s’amorce.
Tous
ces changements fragilisent le jeune collégien, dans le même temps où
il lui est demandé d’acquérir de plus en plus d’autonomie, tant
par rapport à sa scolarité qu’à sa famille.
Le repère
constant et continu sur lequel il peut s’appuyer est l’entité
classe. Ce groupe est la référence à laquelle se rattache l’élève
toute la journée. C’est sur lui, en lui, à travers lui que l’enfant
va construire. Cela va lui permettre d’édifier peu à peu son unité
et renforcer son identité.
Bases théoriques :
Une action de
prévention primaire est essentiellement basée sur un concept positif pour développer des projets créatifs, des
alternatives capables de mobiliser qui exigent la participation de
chacun dans le respect des différences. S’il est impossible de
supprimer tous les risques auxquels sont exposés les enfants, la
plupart peuvent cependant être considérablement réduits par un
apprentissage continu et cohérent d’attitudes et de comportements qui
s’échelonne tout au long de la scolarité.
Nous ne pouvons
éviter à l’enfant les risques de la vie, les difficultés et les
souffrances. Tout enfant peut construire quelque chose de positif à
partir de ses difficultés, s’il a la possibilité d’en parler avec
des adultes qui savent l’écouter, le comprendre et lui donner
confiance en lui-même.
Par l’expression
de soi, de ses sentiments, de ses opinions et de ses désirs, l’enfant
découvre lui-même ses limites. Il augmente ses capacités de jugement,
son esprit critique et son sens des responsabilités. C’est par la
parole que l’enfant s’insère dans la vie sociale et affine ses
relations ave les autres. L’instauration d’un groupe parole au sein de l’entité classe
favorisera l’atteinte de ces objectifs.
La prévention
des différentes formes de déviance passe par un travail éducatif sur
l’affectivité, les relations interpersonnelles et les compétences
sociales. Intervenir régulièrement et toute l’année sur une classe
autorise le travail de développement des habiletés psychologiques et
sociales de l’enfant.
Ce travail ne peut se faire qu’avec l’appui de tous les
partenaires intéressés à l’éducation de l’enfant et qui
reconnaissent la singularité des élèves de sixième, la nécessité
de les accueillir véritablement dans leur établissement. Cette action
se doit d’être planifiée et intentionnelle, portée par l’établissement.
Pistes
de travail
Il est utile de
consacrer les premières semaines à des exercices qui permettront à l’entité
classe de se constituer en groupe interactif. Tout en se découvrant
mutuellement, il s’agit pour le groupe de définir et de négocier des
règles de fonctionnement leur permettant d’atteindre les objectifs
fixés, tout en travaillant dans un cadre, où chacun est respecté en
tant que personne.
A travers des
jeux de coopération, de découverte, puis de confiance en l’autre,
les participants vont se sentir à l’aise et améliorer la cohésion
du groupe. Elle autorisera par la communication authentique en son sein,
des apprentissages, un travail sur les valeurs, une réflexion qui
intègre l’avis des autres et des changements éventuels de
comportement.
2. LES
ACTIONS
1.
Les objectifs
Dans le cadre du projet d’établissement et de son évolution,
différents axes de travail ont été choisis pour répondre aux
difficultés observées au collège Alain :
-
la réussite de
tous les élèves
-
l’orientation
au collège
-
l’animation
vers une socialisation
-
l’ouverture
vers l’extérieur.
“ Paroles, parole ” s’inscrit dans ces différents
axes.
L’action
vise à faciliter et favoriser l’adaptation des élèves au collège
(essentiellement pour les 6ème) en travaillant sur la
connaissance de soi et les représentations de l’Ecole. L’élève
doit apprendre à faire confiance au groupe et à mettre en évidence
ses capacités pour pouvoir influer sur son avenir.
Il s’agit
de mettre en valeur l’individu, de lui faire prendre conscience des
éléments positifs de sa personnalité et de ses capacités scolaires
pour l’aider à bâtir un projet personnel et professionnel réaliste
et valorisant.
Outre les
objectifs concernant le projet personnel et professionnel de l’élève,
ces séances doivent permettre à chacun de s’exprimer, d’être écouté donc reconnu.
“ Paroles,
parole ” favorise l’expression d’émotions, de sentiments, de
points de vue, de questionnements personnels avec un droit de réserve
sans crainte de jugement. Le groupe permet d’aborder différents
thèmes par des points positifs faisant appel au goût de vivre, au
plaisir de la communication réussie et du lien créé.
Nous avons fait le pari que la parole peut être une alternative
à la violence, cherchant à
faire évoluer le climat relationnel au sein de l’établissement, et participer à une meilleure
socialisation du jeune.
Ce
meilleur climat peut être obtenu en améliorant les relations élèves
- élèves mais aussi adultes - élèves et adultes - adultes. Pour y
parvenir, les adultes doivent pouvoir également exprimer leurs
ressentis à l’occasion :
-
de réunions
bi-trimestrielles regroupant tous les intervenants internes et externes
au collège (infirmières psychiatriques de NEMO qui nous apportent un
regard extérieur)
-
d’un groupe d’analyse
de la pratique (2h/mois),
ouvert à tous les adultes volontaires participant ou non à l’action,
animé par une formatrice du centre Michel Delay.
-
d’actions de
formation organisées au sein du collège.
2. Mise
en place et évolution de l’action
Il est
important de souligner que l’action est en perpétuelle évolution
depuis son démarrage :
a) Après les
groupes paroles avec les élèves délégués (96/97), plusieurs pistes
de travail nous ont paru intéressantes à mettre en place :
- préformation
des délégués
- donner une
vraie place à l’élection des délégués
- mettre en
place une formation réelle pour les délégués élus
- faciliter l’accueil
des plus jeunes par les plus anciens, tant au niveau des élèves qu’à
celui des adultes
- essayer de
mettre en place un groupe paroles pour les élèves difficiles
- associer les
élèves à l’élaboration du règlement intérieur.
b) A la fin de
l’année scolaire 97/98, il nous a semblé que la parole et l’écoute
avaient permis une amélioration du climat au sein de l’établissement,
et que nous devions renforcer des espaces de paroles afin de créer de
nouvelles relations élèves - adultes. Le temps était venu de se
reconnaître en tant que « personne » afin de mieux vivre
ensemble.
Pour cela,
trois propositions étaient faites :
- groupe paroles pour chaque classe de sixième : rencontre une fois
tous les 15 jours avec deux adultes pendant une heure, en alternance
avec l’heure de soutien, inscrite à l’emploi du temps, pour essayer
de mieux vivre l’entrée au collège ;
- groupe pour les élèves de troisième : rencontre pour les
élèves de 3ème, par demi - groupe classe, une fois par mois, avec
deux adultes, pour mieux préparer leur orientation et leur sortie du
collège ;
- groupe adultes : mettre en place un groupe d’analyse de la
pratique pour les adultes volontaires et favoriser l’accueil des
nouveaux adultes de l’établissement autour d’un « repas
rencontre » hebdomadaire
c) En septembre
1998, le projet évolue :
- mise en place
de groupe paroles pour toutes les classes de 6ème, en plus de leur
emploi du temps, une fois tous les 15 jours, en alternance avec le
soutien ;
- mise en place
du groupe paroles, seulement pour les deux classes de 3ème SEGPA, à
raison d’une heure par semaine, inscrite dans l’emploi du temps ;
Contrairement
au projet initial, nous n’avons pas pu mettre en place les groupes
paroles dans toutes les classes de 3ème, en raison des contraintes d’horaires
;
- mise en place
d’un groupe d’analyse de la pratique pour les adultes volontaires,
deux heures une fois par mois, conduit par une animatrice du Centre Michel Delay.
d) En septembre
1999
q
Pour les
élèves de 6ème, une heure de vie de classe est inscrite à l’emploi
du temps. Elle est utilisée en alternance par le professeur de
français et par le groupe “ paroles ”. Chaque séance est
animée par deux adultes, un professeur de la classe de préférence et
un autre intervenant qui peut être CPE, infirmière santé scolaire,
assistante sociale scolaire ou infirmières psychiatriques de l’association
NEMO. Ces séances sont bâties autour d’un rituel et d’un support
(blason, poèmes, sujet débat, expo, etc…) qui permet de canaliser l’expression
du groupe. La participation de chacun est favorisée. Les adultes sont
là pour y veiller et s’impliquent eux-mêmes dans l’échange. On s’accorde
un droit de réserve par rapport à ce qui est dit et partagé. On met
en avant les aspects positifs : le groupe paroles n’est pas un lieu de plainte, ni un lieu où l’on
résout des problèmes. La confidentialité des propos est demandée à
chaque membre du groupe mais, toutefois, si au cours d’une séance, un
problème est soulevé, les animateurs orientent l’élève vers la
personne ressource concernée et assurent le relais.
q
Au niveau des 3ème
SEGPA, l’heure est également intégrée à l’emploi du temps à
raison d’une heure tous les quinze jours. La séance s’organise de
la même façon mais les supports sont destinés à favoriser l’orientation
et la vie après le collège (affinement du projet personnel,
connaissance de soi, autonomie).
q
Parallèlement,
un groupe d’analyse de la pratique a été mis en place au collège.
Il rassemble une dizaine d’adultes de l’établissement qui ont
besoin de prendre de la distance, de trouver un espace d’expression
pour ancrer et structurer le travail d’équipe. Il s’agit d’aider
les participants à verbaliser les difficultés de leur pratique
professionnelle, en décodant, analysant et dédramatisant des
situations vécues. En outre, la connaissance du vécu et du
comportement des jeunes en difficulté est abordée lors de ces
séances. Une formatrice du Centre Michel Delay (centre ressource
académique) assure la régulation de ces temps de parole qui doivent
rester confidentiels.
q
Un stage sur la
communication (type Gordon) a été proposé par le chef d’établissement
aux personnes engagées dans l’action (2 fois 3 jours).
3. LES CONDITIONS DE FONCTIONNEMENT
1.
Une action inscrite dans le projet d’établissement
Inscrite dans une philosophie du projet, cette action a été,
dès son origine, clairement affichée comme faisant partie du projet d’établissement
et le Conseil d’Administration l’a approuvée comme telle. De ce
fait, le fonctionnement des groupes est prévu dans les emplois du
temps, géré par l’administration du collège. Il s’agit bien d’intégrer
ce projet dans le quotidien de l’établissement, en évitant toute
marginalisation de type “ projet
expérimental ” se déroulant en dehors de la semaine “ normale ”. Chaque opportunité institutionnelle (par
exemple la création des “ heures
de vie de classe ” peut ainsi être plus facilement saisie
par l’équipe, afin de disposer des moyens nécessaires (en heures
notamment). Comme tout projet, cette action est en constante évolution
afin de s’adapter aux changements de l’établissement.
2.
Une équipe pluricatégorielle et
partenariale
Enseignants de plusieurs disciplines (arts plastiques, EPS,
français, histoire-géographie, professeurs des écoles de la SEGPA),
non enseignants (assistante sociale, CPE, infirmière, principal) mais
aussi infirmières psychiatriques, membres d’un centre de prévention
et d’accueil des toxicomanes et de leurs familles (NEMO) constituent
une équipe d’une vingtaine de personnes.
Dès l’origine,
il a été décidé que chaque groupe serait animé par un
binôme : enseignant (de la classe, le plus souvent, mais pas
toujours) / non enseignant. Ce choix d’un adulte connaissant bien les
élèves dans le cadre des cours habituels et d’un autre adulte “ plus extérieur ” s’est
avéré profitable.
3.
Un travail d’équipe
Les binômes se
réunissent régulièrement pour préparer ensemble les séances et
tirer le bilan des séances passées. De plus, des réunions de
régulation avec toute l’équipe, se déroulent deux fois par
trimestre. Elles permettent de faire le point et de préparer les
thèmes que les groupes paroles aborderont au cours du bimestre suivant.
Ces groupes travaillent aussi sur les outils à fabriquer pour le bon
déroulement des séances, évitant ainsi de laisser chacun livré à
lui-même. Ce travail d’équipe s’appuie fortement sur l’atelier d’analyse
de la pratique . Il a aussi
bénéficié d’actions de formation spécifiquement organisées pour
le personnel du collège
4. Les outils
Plutôt que de
présenter les outils tels quels, nous avons choisi de montrer l’évolution
de nos interventions sur une année et les objectifs recherchés à
travers le choix des outils utilisés.
- Les
premières séances sont utilisées pour bâtir la cohésion du groupe.
Plusieurs jeux vont permettre à chacun d’énoncer son prénom, ses
centres d’intérêt dans un groupe attentif, écoutant.
Prénoms
à répétition
Quelqu’un commence et dit
son prénom. La personne répète le prénom et ajoute le sien, ainsi
de suite ...
Présentation croisée
- faire des paires en fonction des affinités, en précisant que l’adulte
doit être avec un enfant.
- 10 minutes pour se présenter à l’autre, pour qu’il nous
présente ensuite au grand groupe.
En grand groupe : Chacun décrit la personne qui s’est présentée à lui, sans
être interrompu par celle-ci, qui peut éventuellement intervenir
après.
A la fin de la séance, un temps de réflexion est prévu pour que
chacun puisse dire ce qu’il a ressenti quand quelqu’un parle de
lui, dans la découverte des autres.
Toutes nos
rencontres vont démarrer par un jeu rituel, qui sert à réinstaller le
groupe dans la dynamique acquise au fil de nos rencontres.
-
Une communication authentique établie dans un groupe va autoriser
chacun à se sentir à l’aise
et par là - même à échanger, à intégrer les avis des autres et à
changer éventuellement sa manière d’agir.
- Les séances
suivantes vont faire travailler le groupe autour de soi et les autres.
Différents
outils vont permettre à chacun de se reconnaître ou reconnaître l’autre
dans une dimension positive.
Jeu des qualités
Quelqu’un va piocher une qualité qu’il attribuera à la
personne dans le groupe qui la porte le mieux. Celle-ci piochera à
son tour. Tous les adultes participent, chacun va donc recevoir une
qualité et en attribuer une (sur la fin, le choix des personnes
étant restreint, il est possible de piocher de nouveau).
Echange autour des questions suivantes :
- cette qualité vous va-t-elle bien ?
- est-ce que ça vous fait plaisir qu’on vous donne cette
qualité?
- est-ce qu’une autre qualité vous irait mieux ?
L’acrostiche
Des paires sont faites en fonction des affinités.
Chacun va devoir faire l’acrostiche de l’autre.
Il doit donc illustrer le prénom de l’autre en lui trouvant des
qualités commençant par les initiales du prénom.
Une fois terminé, chacun récupère son acrostiche.
D’autres jeux
vont aider l’enfant à mieux comprendre ses sentiments et à les
exprimer, à réaliser que chacun est différent dans sa manière de
réagir face à des situations.
Jeu des
cartes piochées
Terminer les phrases que
chacun tour à tour nous allons piocher. Exemple : je me suis senti
gêné...
Une des
dernières séances va amener le groupe à prendre une position
collective.
L’objectif du
travail est la négociation : chaque enfant va devoir donner son avis, l’argumenter
au mieux, éventuellement le défendre, peut-être en changer afin qu’une
décision collective puisse être prise.
Un temps de
travail individuel permet d’abord à chacun de donner son avis dans le
groupe . Il sera suivi d’une séance de réflexion collective.
1er temps :
Le coeur de l’amitié
« Pour moi, l’amitié c’est " : Enormément
de … beaucoup de … Un
peu de … pas du
tout de..."
2ème temps :
La recette de
l’amitié
Inventer sous
forme de recette de cuisine drôle, les ingrédients qui composent l’amitié
(propositions de phrases)
* Peler ...
* Couper ...
en fines lamelles
* Faire
fondre ... dans une casserole
* Battre ...
avec une pincée de ...
*Mélanger
délicatement ...
* Faire
revenir tout doucement ...
* Presser ...
pour éliminer
* Ajouter une
pincée de ...
* Casser ...
* Séparer
... des ...
* Eplucher
... pour enlever ...
* Mélanger
bien ... avec le fouet
* Répartir
dessus ...
* Déposer au
milieu ...
* Etaler ...
* Rajouter
pour décorer ...
* Ajouter ...
et faites revenir avec ...
* Enduire le
moule de ...
* Incorporer
...
* Parfumer d’un
zeste de ...
* Porter à
ébullition ...
* Hacher
finement ...
* Faire
macérer ... dans ...
4
. APPROCHE ET THEORIE PSYCHODYNAMIQUE
Parmi les concepteurs du projet Paroles, les intervenants du
groupe NEMO poursuivent une réflexion théorique du point de vue
psychologique.
« Le sujet humain se définit par le rapport qu’il
entretient avec le plus intime de lui-même. Cette intime - intimité
est le lieu du secret (soi-même) bien sûr, mais aussi celui de la
démesure du désir, du rêve, des contradictions les plus stimulantes,
lieu de la mémoire, des expériences du corps., du coeur, de la
pensée, foyer de toute passion pour un objet, passion qui permet de
rencontrer le monde. Parfois, parce que cette intime - intimité est
menacée, il faudra à ce sujet beaucoup de courage pour l’affirmer.
Parfois confronté à des situations limites, il devra pour la protéger
apprendre à garder le silence. On ne peut penser un individu humain
sans le référer au milieu humain, c’est-à-dire culturel qui l’accueille
à sa naissance. Donc, avant de naître, un sujet appartient à un
monde, avec ses valeurs, ses lois, ses rites, sa richesse et ses
impossibles, qui est déjà là et l’attend. Dans ce sens, rencontrer
le monde, c’est toujours le reconnaître à la fois comme étranger et
familier pour le traduire dans les termes actuels de nos existences.
Autrement dit, rencontrer le monde c’est le transformer en même temps
qu’il nous transforme ».
Le groupe
classe dans son organisation sociale apparaît comme un terrain
privilégié d’expérimentation et de rencontre,. Toutefois, l’idée
généreuse que l’instauration du dialogue est le meilleur moyen de
réduire la violence est une idée vaine si on ne précise les
conditions, les limites et la nature de la discussion. D’où la
nécessité permanente de construire ensemble un cadre de référence
cognitif, de partager des informations et de repérer des points
communs.
La
mise en oeuvre d’action spécifique telle que le groupe parole amène
tous ceux qui y participent à échanger. Il est important que les
enfants retrouvent dans l’équipe d’animation ce que nous valorisons
dans le groupe, la relation. D’où la nécessité pour les adultes de
développer cette capacité à échanger sur leurs pratiques, leurs
difficultés, voire leurs sentiments d’impuissance face à
différentes situations. C’est d’autant plus important pour l’animateur
enseignant, parce qu’il a une position décalée par rapport à son
cadre classique de travail, s’appuie sur une équipe reconnaissant sa
valeur personnelle et professionnelle. En effet, cette action le place
avant tout comme sujet alors qu’il se positionne en tant que
professeur habituellement.
La première
étape serait de repérer ce qui fait violence à chacun dans sa
personnalité et sa mission professionnelle.
L’autre
étape nécessaire pour coopérer en équipe ou partenaires serait
ensuite de « se sentir, « se mesurer », s’imaginer
meilleurs. Sans de tels mouvements avec un désir d’aller plus loin,
aucun changement ne peut s’accomplir.
L’action de
prévention passe par un apprentissage et une reconnaissance de la vie
psychique.
Le principe
serait d’aider les enfants à exprimer leur vie pulsionnelle et à
mentaliser les conflits. De même que la violence qui se place au front
des manifestations défensives, il faut prendre en compte tous les
sentiments déprimants d’ennui profond.
« Nul ne peut contenir son agressivité psychique primaire,
la haine envieuse et destructrice. Nul ne peut contrôler la tentation d’abuser
de sa force en quelque domaine où il se trouve être le plus fort, nul
ne peut opposer aux violences dont il est le témoin ou la victime, un
double effort de fermeté et de réflexion, s’il n’a pas
intériorisé des expériences régulatrices effectuées dans un groupe
d’abord familial puis social ; si dans son équilibre psychique ne
fonctionne pas une référence à la loi d’un groupe réel ou
symbolique ; si sa vie quotidienne ne s’insère pas dans des cadres
groupaux ou sociaux dans lesquels la violence peut être mise en
dépôt. L’appartenance des enfants à des groupes est dans cette
perspective une nécessité ».
Réf. bibliographiques
De l’amour à
la pensée, Heitor O’Dduryer de Macedo, Ed. L’harmattan
La dynamique
des groupes restreints, D. Anzieu, J.Y. Martin, Puf
Recherche
clinique de la prévention, D. Mellier, Centre Némo
CONCLUSION
Tout
le travail conduit au collège Alain s’inscrit dans une démarche de
projet : aussi les actions sont-elles modifiées en fonction de l’évolution
des conditions mais aussi selon la rencontre d’approches théoriques
nouvelles.
Par exemple, la
découverte des travaux de Daniel Favre a étayé l’avancée du projet
au cours des derniers mois. En effet, D. Favre insiste sur le fait que
le langage verbalisé et extériorisé sert avant tout à la
communication interpersonnelle. « Le langage intérieur »
permet d’associer des images mentales ou des représentations ainsi
que des sensations avec des mots. Il met l’accent sur le rôle du
langage intérieur dans sa fonction de préparation à la communication
sociale, mais également dans sa fonction de régulation des
comportements.
D’autres ont
montré que « le détour » par le langage permettait non
seulement de structurer la pensée, mais également de prendre
conscience du comportement effectués de manière plus ou moins
automatique et ainsi d’exercer sur eux un meilleur
« contrôle ».
D’où l’importance
d’acquérir la capacité de mettre des mots précis sur des
représentations ou des ressentis pour avoir davantage de pouvoir sur
ses actes, pour avoir une possibilité de réguler un peu mieux nos
rapports avec notre affectivité.
Quelques
caractéristiques de l’adolescent désigné comme violent :
-
il présente
une forte agressivité associée à des syndromes d’anxiété et de
dépression
-
il vit dans une
logique d’immédiateté
-
il situe, le
plus souvent, à l’extérieur de lui-même l’origine des
événements désagréables de sa vie
-
il est
incapable de nommer et d’identifier ses émotions et ses sentiments en
situation de frustration.
La
violence, un besoin d’affaiblir autrui. La violence est “ l’ensemble
des comportements résultants du besoin acquis de rendre l’autre ou
les autres faible(s), inconfortable(s) et impuissant(s) pour pouvoir,
soi-même, se sentir fort, confortable et puissant ”.
Le
développement du langage intérieur comme alternative à la violence
dans des ateliers de communication.
1er
objectif : faire l’hypothèse
qu’autrui est différent de soi et qu’il a d’aussi bonnes raisons
que soi de penser ce qu’il pense, d’agir comme il le fait, de dire
ce qu’il dit et de ressentir ce qu’il ressent ;
2ème
objectif : admettre qu’éprouver des émotions, avoir des sentiments n’est
pas une faiblesse mais une richesse, une source de sensations et d’informations
importantes sur soi et sur le monde ;
3ème
objectif : expérimenter qu’exprimer ses émotions c’est se rendre fort,
c’est oser exister tout entier tandis que les masquer c’est faire
preuve de faiblesse ;
4ème
objectif : devenir tolérant et “ entrouvert ” à d’autres
points de vue que le sien, admettre que toute “ vérité ”
ne l’est que dans un contexte donné et que la connaissance de ce
contexte est tout aussi importante que la vérité elle-même.
Il
s’agit peu à peu d’amener ces adolescents à rester en contact avec
leurs émotions en les acceptant et en les reconnaissant comme valables.
Avec ces
ateliers de communication, les jeunes ont commencé à s’autoriser à exister avec cette dimension d’eux-mêmes,
à abaisser leur seuil de tolérance aux changements. Ils découvrent
ainsi une autre forme de puissance : celle de pouvoir exister tout
entier et de pouvoir s’affirmer.
Les
expériences menées autour de l’agressivité tendent à montrer qu’il
est possible de réduire de manière “ curative ” la
violence en substituant un “ circuit long ” impliquant le
langage intérieur et l’ “ autocontrôle ” au “ circuit
court ” relevant d’un automatisme où la frustration déclenche
la violence.
Il est certes
difficile d’évaluer l’impact de notre démarche sur une période
aussi courte. Toutefois, il semble que les contacts entre les personnes
se font avec moins d’agressivité et nécessitent moins d’interventions
vives ; la principale difficulté reste de gérer des adolescents pour
qui la reconnaissance du quartier est plus importante que la
reconnaissance du collège.
Chez eux, le
besoin de violence fonctionne comme une drogue pour compenser leur mal
être.
Chez eux, la
perception des évènements comme des sources de frustration déclenche
de manière automatique l’action violente par la colère ou la perte
du contrôle de soi.
Sans
intervention extérieure ces jeunes sont peu capables de modifier d’eux
- même ce qui peut devenir une addiction : répétition réflexe, de
violence.
Le
développement d’attitudes portant sur le langage étant à l’origine
du traitement autonome de l’information peut permettre :
- de prendre
conscience que chacun joue un rôle et a une part de responsabilité
dans les évènements désagréables de sa vie.
- de
reconnaître, d’identifier et d’accepter les émotions et les
sentiments ressentis en situation de frustration.
- de
développer et d’enrichir « le langage intérieur » (cf :
Daniel Faure : laboratoire de Modélisation de la relation pédagogique
de Montpellier) de sa fonction régulatrice des comportements.
Ainsi, le
langage, l’expression servent de médiation entre la perception et la
réaction violente et permettent de développer des comportements
alternatifs à la violence qui ne soient pas une forme de soumission.
Garder le
contact avec ces jeunes au bord de la révolte, par une écoute sans
cesse présente, dans le respect de la loi, permettant ainsi une
reconnaissance de la personne, semble être une piste intéressante pour
assainir un climat de tension qui s’atténue peu à peu.
« Instaurer un dialogue, s’écouter avec respect, valoriser et mettre
en avant les qualités, prendre conscience de nos façons de
fonctionner, oser exprimer les sentiments, les émotions, les rêves…
Se Connaître comme une Personne pour mieux se Reconnaître… S’accepter,
se comprendre, se transformer mutuellement, généreusement…
Les groupes parole ont permis de se mettre en mouvement, de se
donner les moyens d’un nouveau regard sur les Uns et les Autres…
Réconciliés…Riches de la force d’une parole vraie partagée ,
sur le chemin d’une nouvelle relation, capable de libérer les
énergies…
Croire enfin que
« tout se rejoue chaque jour » , que tout est possible… »
ZOOM : LE BINOME
Les groupes
Paroles sont animés par deux adultes, ce qui n’est pas un mode de
fonctionnement très habituel. L’un d’eux est un professeur, le plus
généralement enseignant de la classe, quelle que soit sa discipline.
Le second est un non enseignant : assistante sociale scolaire, CPE,
infirmière scolaire, infirmière psychiatrique de Nemo, surveillant. Ce
mode de fonctionnement nous semble présenter de nombreux avantages :
Etre complémentaires :
Ce regard croisé amène une richesse d’analyse.
Etre deux adultes de formations professionnelles différentes est
une richesse pour ce temps très particulier. Les points de vue sont
forcément différents et permettent ainsi un double regard sur ce qui a
été dit, mais surtout compris, interprété.
Les personnalités sont forcément différentes donc
complémentaires. A deux on peut mieux limiter les erreurs : le second
envisage souvent des propositions ignorées par son collègue. La parole
d’un enfant est forcément différente selon qu’on est infirmière,
prof, surveillant, et c’est un enrichissement de l’entendre à deux.
Eviter de dériver :
Le tandem professeur - autre adulte est nécessaire : en effet, en
tant que professeur, j’aurais peut-être trop tendance à vouloir
reproduire, durant les groupes Paroles, une parole ou une attitude de
« prof ».
Se sentir soutenu :
Pour moi, intervenante extérieure, je ne peux pas envisager de
prendre une classe sans être accompagnée d’un référent de l’institution.
Un garde-fou :
Cela permet d’avoir une barrière supplémentaire face à des
confessions de jeunes qui déborderaient du cadre. Deux adultes ça me
semble indispensable face à toute une classe avec un contenu ouvert,
libre.
Travailler en équipe :
Travailler à deux renforce le rituel du début de chaque séance.
Cela oblige à préparer les séances ensemble en amont.
Pour un Conseiller Principal d’Education, c’est l’occasion
de travailler avec des professeurs pour autre chose que des questions de
Vie scolaire.
Créer des liens entre adultes :
A deux dans ces groupes, on vit des émotions communes.
Travailler à deux permet de mieux se comprendre en tant que
personnes.
Les deux adultes doivent se choisir mutuellement. (ceci permet à
l’élève une approche relationnelle cohérente vis à vis de tous les
personnels).
Ne pas parler que de l’école :
Pour les élèves la présence d’un intervenant extérieur
facilite le fait de parler d’autre chose que de l’école.
Des difficultés aussi :
Ce binôme n’est pas naturel et doit donc se construire avec
deux personnes qui ont à se découvrir.
La gestion d’un groupe au-delà de 15 élèves reste
périlleuse.
Il faut que les deux adultes s’impliquent et soient soucieux du
bon fonctionnement : on s’engage réellement, sinon les deux personnes
n’avancent pas à la même vitesse et ne sont parfois plus dans le
contexte initialement prévu.
Travailler à deux suppose du temps : il faut préparer, mais
aussi discuter après les séances.
Au-delà
de ces difficultés, travailler en binôme nous semble une piste de
travail intéressante qui ouvre la voie à un travail d’équipe
favorisant les échanges et les nouvelles relations.

(BI =
bilan intermédiaire produit en juin 1999)
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